Tag Archives: entreprises libérées

Les entreprises libérées réinventent la GPEC !

93 % des cadres dirigeants déclarent que le succès à long terme de leur stratégie dépend de leur capacité à innover . La structure pyramidale étant un frein à l’innovation, il est devenu une priorité pour les entreprises de réinventer leur mode de management. Certaines ont choisil’entreprise libérée, société dans laquelle « les salariés peuvent décider toutes actions qu’ils considèrent eux-mêmes comme étant les meilleures pour l’entreprise » . L’autonomie, la responsabilité et le développement des compétences, reconnus comme les facteurs de motivation des salariés, sont les maîtres-mots de l’entreprise libérée. Pour ces dernières, la gestion des compétences est donc un pilier. Notre avons donc souhaité porter notre attention sur les actions mises en place en termes de développement et d’optimisation des compétences des salariés dans ces structures.

L’entreprise libérée, un mode de management innovant

sourire

Le contrôle coûte cher et 50% des énergies dans les structures pyramidales sont uniquement concentrées à contrôler les 3% de salariés qui ont besoin de se faire recadrer. Il est donc nécessaire de diminuer le contrôle. D’après Jean-François Zobrist de l’entreprise Favi, la confiance coûte beaucoup moins cher que le contrôle, c’est pourquoi, il faut motiver les salariés en les responsabilisant et en les rendant autonomes. Ceci n’est possible qu’en modifiant l’organisation en profondeur et en adoptant donc un mode de management innovant. Dans l’entreprise libérée, la hiérarchie est supprimée, l’information est partagée par tous pour permettre aux salariés de prendre eux-mêmes les décisions. L’entreprise est divisée en équipes, chacune représentée par un team-leader qui remplace le manager.

Ayant plus d’autonomie et de responsabilités, les salariés doivent gagner en polyvalence et la gestion des compétences devient alors un enjeu clé pour la performance de l’entreprise.

2 exemples de GPEC innovantes en entreprise libérée : le Groupe Hervé et le Groupe Poult

Groupe Hervé : vers une déspécialisation des salariés

Le groupe Hervé, spécialisé dans les énergies, a pour ambition de déspécialiser, de valoriser et d’accélérer le transfert des compétences de ses 2 800 salariés. Pour répondre à ces objectifs, un salarié volontaire, appelé “animateur fonctionnel” prend le rôle de référent. Par exemple, un plombier, formé par un collègue, peut être le référent pour la partie juridique. Tous les animateurs fonctionnels se réunissent mensuellement pour échanger leurs bonnes et mauvaises pratiques et partager leurs expériences dans le but d’améliorer la performance de l’entreprise. Michel Hervé, PDG du groupe, a mis en place cette action car selon lui “on écoute toujours la parole d’un « pair » plutôt que la parole du « père » ».

Groupe Poult : la montée en compétences par l’entrepreneuriat

Quant à Carlos Verkaeren, PDG du groupe Poult, sa stratégie est de faire participer ses salariés à l’innovation et déclencher de nouveaux business en adoptant une politique de montée en compétences.

L’une des initiatives de l’entreprise a été la mise en place de la « formation intrapreneuriat et leadership », parcours d’apprentissage innovant d’une durée de plusieurs mois, dans le but de faire émerger une nouvelle activité pour la société. L’objectif de l’initiative est d’apprendre à oser par l’entrepreneuriat en équipe. A partir de la méthode pédagogique finlandaise “team academy”, initialement mise en oeuvre dans les écoles, chaque équipe travaille par projet dans une logique d’intelligence collective. Un salarié volontaire, tel qu’un responsable R&D, expert en innovation ou encore directeur des ressources humaines, est attribué comme coach d’équipe pour accompagner les salariés dans leurs projets et transmettre ses compétences. Grâce à cette initiative, un ouvrier du groupe Poult, n’ayant aucun diplôme, peut alors apprendre à concevoir un business plan, à calculer un prix de revient industriel ou à communiquer sur les réseaux sociaux. Les principes de cette méthode pédagogique nouvelle sont en total accord avec ceux du modèle de l’entreprise libérée, basés sur la responsabilisation et l’autonomie données aux salariés. Cela leur permet de monter en compétences par l’entrepreneuriat, en s’engageant pour l’innovation de l’entreprise.

L’autre initiative intéressante élaborée par le groupe est celle des “ateliers du mardi”. Un salarié expert sur une thématique en lien avec l’activité intervient auprès de ses collaborateurs pour leur transmettre ses compétences et leur partager ses expériences. Par exemple, les salariés ont pu découvrir l’analyse sensorielle et l’éco-conduite, s’initier à l’informatique ou aux tableaux croisés dynamiques. Autant d’ateliers pour déspécialiser les salariés par la montée en compétences.

Ces initiatives ont permis au groupe d’améliorer sa croissance de 13% en 2013 sur un marché qui recule de 2% et selon Jérôme Introvigne, directeur du management de l’innovation du groupe Poult,  « 70 % de la croissance de notre groupe sont générés par les nouveautés ».

Le Business model des entreprises libérées

  • Le Business Model entreprises libérées

Les entreprises libérées s’affranchissent largement de la hiérarchie et du contrôle. Leur Business Model s’en trouve profondément modifié.

Les entreprises libérées ont la cote ! Elles ont été ainsi célébrées dans un documentaire de Martin Messonnier sur Arte intitulé « Le bonheur au travail ». Le concept central de ces entreprises, c’est la remise en cause du système hiérarchique et du lien de subordination du salarié.

La remise en cause prend des formes différentes : Groupes de production autogérés dans chez Favi (équipement automobile) ou Leader désigné par les pairs chez Gore (matériaux). Le livre de Getz et Carney (Liberté et Cie, Fayard, 2012) met en avant les bénéfices organisationnels et de cadre de vie pour les salariés : autonomie, estime de soi retrouvée, satisfaction professionnelle, engagement.

Paradoxalement, peu de questions ont été posées sur la durabilité du modèle de l’entreprise libérée. Les grandes expériences passées d’autogestion, notamment l’expérience yougoslave, se sont mal terminées au bout de plusieurs années de mise en œuvre. Une façon de regarder la durabilité de ces entreprises libérées, c’est alors de regarder leur Business Model – modèle d’affaires en français – pour identifier les points originaux en termes de coût et de revenu et d’en apprécier la pérennité.

Les entreprises libérées ont été façonnées en réaction à la hiérarchie et au contrôle qui lui associé. Comme le dit le patron de l’entreprise Favi, Jean-François Zobrist, ici la conviction, c’est que l’homme est bon et responsable et que le contrôle qui structure l’entreprise n’a pas de sens comme modèle d’organisation global. Favi a donc été organisée par groupes de travailleurs autogérés et la hiérarchie totalement supprimée.

Favi a aussi été organisée en supprimant quasiment toutes les fonctions supports, c’est-à-dire les personnes et services qui aident au bon fonctionnement général de l’entreprise (par exemple systèmes d’information, qualité, ressources humaines, encadrement et pilotage de l’entreprise), mais qui ne sont pas directement affectés aux opérations productives.

Ce faisant, le modèle de coût – revenu de l’entreprise s’est fortement transformé. Les entreprises industrielles ont – sur la base d’une étude de 2007 – une structure de coûts répartie à 75 % sur des coûts directs et à 25 % sur des coûts indirects. Favi a donc fait des économies de coût à la fois sur les coûts directs en supprimant la hiérarchie affectée à chaque ligne de production et aussi – surtout – sur les coûts indirects en réduisant très sensiblement les fonctions support.

À côté de ces modifications portées à la structure de coûts, les entreprises libérées se caractérisent aussi par une attention portée à l’innovation. Cette innovation peut-être poussée par des mécanismes d’incentive financier. Mais elle peut-être aussi encouragée par la mise en place d’un cadre de travail qui dégage du temps pour les personnes qui le souhaitent en vue d’innover.

Ce système n’est pas nouveau et il a été développé dans de nombreuses entreprises. Mais il s’applique particulièrement bien dans des entreprises qui comme les entreprises libérées, permettent un croisement des attentes des individus, de leurs compétences et des intérêts de l’entreprise.

C’est par exemple le concept du Sweet Spot de l’entreprise Gore, qui favorise l’alignement des trois variables. Ces mécanismes permettent une innovation produit et/ou service, qui abaisse leur coût unitaire. L’innovation permet aussi une diversification liée dont on sait que c’est la plus rentable et efficace pour l’entreprise. On est en face d’un modèle cohérent qui permet d’amener une pérennité du Business Model et de l’entreprise.

L’entreprise libérée a été plutôt appliquée en milieu industriel. Or l’enjeu en termes de changement de Business Model est sans doute plus fort encore dans les services : l’étude de 2007 parue dans Management Accounting Research et conduite par Al-Omiri et Drury (A survey of factors influencing the choice of product costing system in UK organizations) indiquait que la structure de coût des entreprises de service et de retail était une structure de coûts répartie à 49 % sur des coûts directs et à 51 % sur des coûts indirects. Il y a donc un potentiel de réduction des coûts importants dans de tels secteurs avec le modèle de l’entreprise libérée.