Parce que la transformation digitale des entreprises ne peut se faire sans un changement profond de la culture d’entreprise, le management 3.0 apparait comme un incontournable.
Voici des pistes de réflexion et de bonnes pratiques.
Beaucoup de dirigeants s’accordent à reconnaître la nécessaire transformation digitale de leur entreprise. Mais combien ont conscience qu’il faut pour cela procéder à un changement des comportements, à un changement managérial ?
« Des entreprises se lancent dans une succession d’initiatives : présence sur les réseaux sociaux, lancement d’une appli, création d’un RSE ou d’un hackathon… Mais cela ne suffit pas ! Il faut agir sur la culture d’entreprise, et donc sur les comportements individuels, dont managériaux », insiste Dominique Buinier, associée de l’entreprise Octo Technology qui organisait ce jeudi 19 novembre à Paris une conférence sur le sujet. De même, recruter des digital natives ou autres avertis n’est pas la solution. « Je connais des entreprises ayant recruté des profils « digitaux » sans avoir changer leur culture. Résultat, ces collaborateurs à haute valeur s’en vont. Si les dirigeants ne comprennent pas cet enjeu majeur, il viendra un temps où ils ne seront plus du tout en mesure de recruter », avertit Dominique Buinier. Comment parvenir à ce changement de culture d’entreprise ? En s’inspirant d’un management 3.0. « Il ne s’agit pas d’un modèle à appliquer à la lettre. Ce n’est pas une formule magique, prévient Dominique Buinier : C’est une boite à outils dans laquelle le manager puise pour tester, expérimenter, s’améliorer en continu. »
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Le lâcher-prise
Le modèle taylorien, opposant les chefs décideurs d’un côté et les salariés exécutants de l’autre, est bel et bien révolu. Et Dominique Buinier de mettre les dirigeants au pied du mur : « Si un client exprime son insatisfaction sur un réseau social, l’entreprise peut-elle se permettre d’attendre que l’information remonte toute la chaine managériale pour qu’une décision soit prise au plus au niveau ? Bien sûr que non ! » L’associée d’Octo poursuit : « Les gens du terrain connaissent la solution…mais encore faut-il qu’ils aient l’autorisation d’agir ! » Dans ce contexte, la notion de confiance est fondamentale. « La confiance ne se décrète pas. Elle n’est pas un préalable, mais la conséquence d’une relation », rappelle Frédéric Rey-Millet, cofondateur d’EthikConsulting, cabinet de conseil en innovation managériale. Concrètement, quelques méthodes simples permettent au manager d’instaurer un climat de confiance. La première d’entre elle est de maintenir le contact. « Passer du temps avec ses collaborateurs, 30 minutes par semaine pour chacun, afin de discuter de sujets purement opérationnels ou autres est un bon début », estime Alban Dalle, manager chez Octo Technology. Cette relation de confiance est à travailler en continu. Afin de s’assurer que les collaborateurs se sentent dans un tel climat, vous pouvez calculer le Net Management Promoter Score. Sur le même principe que le fameux NPS, cet indicateur mesure la confiance des salariés, en leur posant anonymement cette unique question : « Recommanderiez-vous votre manager à votre meilleur ami ? » « Des entreprises comme le laboratoire pharmaceutique Roche ou encore Google y ont recours, avec succès », indique Frédéric Rey-Millet. Autre piste à explorer : les cartes personnelles. Chaque membre d’une équipe écrit sur papier des renseignements sur lui-même : parcours professionnel, valeurs, loisirs, situation familiale… « Chacun est libre de divulguer ou non les informations qu’il souhaite. Elles sont ensuite partagées en groupe, puis détruites. Ca ne doit pas alimenter un dossier sur chaque collaborateur, mais agir en ‘icebreaker’, et ainsi contribuer à s’accorder une confiance mutuelle », souligne Alban Dalle.
Décider autrement
Se pose ensuite la question de la prise de décision. Lâchez-prise signifie-t-il l’absence de managers ? « En instaurant le travail participatif, il n’y a plus un seul manager, mais 20, 30… », évoque Frédéric Rey-Millet. Et de citer l’exemple de la société américaine de jeux vidéos Valve Software, où il n’existe pas de hiérarchie. Simplement des collaborateurs, qui planchent sur des idées et tentent de convaincre les autres de voter pour leurs projets. Les bureaux sont montés sur roulettes, de sorte que les équipes, non figées, se positionnent naturellement pour savoir qui va collaborer avec qui sur tel ou tel projet. Ce que l’on appelle le management tribal, car chacun travaille en tribu, sans attache dans le temps à une équipe. Parvenir à libérer la parole de ses équipes Mais avant d’en arriver à cet extrême, des méthodes peuvent être expérimentées. « Il faut parvenir à libérer la parole. A faire s’exprimer les collaborateurs. Rien de honteux à ce qu’un leader rassemble ses collaborateurs pour un brainstorming en leur disant ‘Je n’ai pas ou peu d’idées sur ce projet, exprimez les vôtres’ ! », conseille Frédéric Rey-Millet. Vous pouvez également vous appuyer sur « l’éventail de la délégation », qui se décompose en cinq niveaux : 1/ Le manager décide seul 2/ Le manager consulte ses équipes puis décide seul 3/ Le manager et ses équipes décident ensemble 4/ L’équipe décide et le manager est seulement consulté 5/ Seule l’équipe décide. « Sur différents points de décision, cochez le niveau qui vous correspond. Par exemple : écrire le contenu de notre site web : niveau 5 ; choix du lancement d’un nouveau projet : niveau 3 etc… Avec l’idée d’aller de plus en plus vers le niveau 5 », suggère Alban Dalle.
Il est toujours intéressant pour le manager de savoir ce qui motive ses équipes. Pour ce faire, Frédéric Rey-Millet vous propose un jeu très simple à faire : le jeu des cartes de la motivation. Affichez 20 cartes sur un tableau, chacune représentant une motivation au travail : Valeurs – Sens – Vision – Challenge – Apprentissage – Reconnaissance – Compétences – Créativité – Flexibilité – Autosatisfaction – Argent – Statut social – Compétition – Évaluation. Distribuez à chaque collaborateur des gommettes : deux vertes, à placer sur les motivations les plus fortes, et une rouge sur la motivation qui paraît la plus faible. A lire aussi : Se former au management bienveillant « Il est intéressant de noter qu’à chaque expérience que j’ai faite, que ce soit en France ou à l’étranger, la compétition est ce qui motive le moins. Alors que beaucoup d’entreprises fondent leur management sur l’esprit de compétition, entre collaborateurs et entre business units… », observe Frédéric Rey-Millet. A contrario, les éléments de motivation les plus fréquents sont liés à l’autonomie, la maîtrise et la contribution à un projet qui nous dépasse. « Ce jeu doit être renouvelé dans le temps, car les motivations peuvent évoluer », recommande encore Frédéric Rey-Millet. Autre version possible de cet exercice : le tableau à remplir de « Ce qui plombe / Ce qui booste » au travail, où chacun remplit et partage ses listes. « Ces pratiques et idées ne sont pas un modèle à calquer », rappelle en conclusion Dominique Buinier. Seuls mots d’ordre : osez, testez, expérimentez !
Retrouvez cet article sur : www.actionco.fr – « Passez au management 3.0 (c’est urgent !) »
Publié le 19/11/2015 par Laure Trehorel