Un marché multiforme et évolutif
Quand on parle restauration rapide, on pense généralement fast-food, ou bien McDo. Une forte progression jusqu’en 2011, tirée par l’évolution du mode de vie Le marché de la restauration rapide progresse très rapidement, +5% chaque année sur la période 2000-2010, tiré par l’évolution du mode de vie : Raccourcissement de la pause déjeuner ou simple changement des habitudes, le français qui trainait plus d’une heure au restaurant il y a 40 ans, ne consacre plus qu’une demi-heure au déjeuner. Et enfin, le Français veut manger moins cher Panne de croissance depuis 2012
Le marché de la restauration rapide, en forte croissance depuis la fin des années 90, a à peine éternué au plus noir de la crise (+9,4% de 2007 à 2009), alors que le marché de la restauration traditionnelle souffrait déjà d’anorexie (-0,2% de 2007 à 2009). Mais, depuis 2012, après une douzaine de très belles années, la restauration rapide s’essouffle à son tour (-0,2% de 2011 à 2014). Cette stagnation, bien que contrastant avec les performances passées, reste une belle performance par rapport à la restauration traditionnelle qui plonge de 6%, et par rapport à l’ensemble de la restauration (-3% de 2011 à 2014, puis stabilisation début 2015). A qui la faute ?
Surtout au consommateur, qui, plus soucieux de sa bourse par temps de crise, va moins au restaurant, préfère des menus moins chers, se prive de dessert, ou de vin, et fréquente plus la cantine (restauration collective +6% de 2011 à 2014). Au consommateur qui finit par se convaincre du bien-fondé des avertissements sur les risques pour sa santé d’une nourriture mal équilibrée. Mais aussi, aux deux hausses successives du taux de TVA dans la restauration, en partie répercutées au client. Aux scandales alimentaires à répétition qui rendent le consommateur méfiant (vache folle, intoxication mortelle chez Quick Avignon en 2011, grippe aviaire, poulets à la dioxine ou aux antibiotiques…). Tous ces éléments impactent l’évolution de la restauration, mais le principal driver à moyen terme reste le pouvoir d’achat des consommateurs (on parle de pouvoir d’achat arbitrable en euros courants) : Depuis 1998, le marché de la restauration traditionnelle progresse chaque année moins vite que le pouvoir d’achat alors que celui de la restauration rapide progresse plus vite. Tout porte à croire que le trou d’air 2012-2014 de la restauration rapide n’est que le reflet d’une forte baisse du pouvoir d’achat des Français (et que l’anomalie 2014 sera corrigée si le pouvoir d’achat se maintient). Un ensemble d’acteurs très hétéroclite Plus de 60 000 entreprises servent des repas rapides en France et emploient plus de 170 000 ETP (salariés ou non). Mais dans ces 60 000 entreprises, une multitude de très petites entreprises (quelque 25 000 auto-entrepreneurs et micro-entreprises, et 35 000 TPE de moins de 2 MEUR de chiffre d’affaires) côtoient 2 700 PME et seulement une douzaine d’entreprises de plus de 100 MEUR de chiffre d’affaires. Les chaines de restauration rapide ne regroupent qu’environ 5 000 établissements mais, avec des ventes de quelque 9 000 MEUR, totalisent une part importante du chiffre d’affaires du secteur. Beaucoup de nouveaux entrants chaque année
Depuis 2007, le nombre de défaillances du secteur hébergement-restauration ne cesse d’augmenter pour atteindre 7 800 en 2014 (contre moins de 5 000 par an au début des années 2000). Et les autoentrepreneurs ne sont pas les seuls nouveaux entrants dans le métier : le monde des chaines de restauration rapide évolue également, avec la pénétration rapide de Subway ou KFC et maintenant le retour de Burger King, mais aussi le développement des chaines de sushi ou des coffee shop. Et puis le lancement de « el Rancho express » ou l’ouverture de salons de café Starbucks dans les magasins Monoprix… Avec tous ces nouveaux entrants dans un marché en panne, la concurrence est rude ! Facteurs clés de succès
Dans un marché fortement concurrentiel, les nouveaux entrants doivent apporter une attention particulière aux facteurs clés de succès : L’emplacement est primordial en restauration rapide. Le client est pressé et ne va pas faire des kilomètres pour trouver un restaurant. Il faut être implanté dans un endroit très fréquenté, proche par exemple d’un hypermarché, d’un centre commercial, d’un cinéma, d’une gare, d’une zone de bureaux… La qualité de service est également importante, même si on ne parle pas de service à table. Il faut que le client soit servi rapidement, il ne supporte pas l’attente. Un accueil agréable est évidemment un plus. Et le prix bien sûr, qui doit rester en dessous de 10 euros. Le prix bas est une des raisons du succès de la restauration rapide ces dernières années, il ne faut pas l’oublier. La qualité des produits, qui n’a pas toujours été le point fort de la restauration rapide, prend aux yeux du client une importance croissante. Les horaires d’ouverture peuvent être très larges. Même si l’affluence est maximale au moment du déjeuner, le client grignote à toute heure du jour et de la nuit. L’équation n’est pas simple pour un petit établissement spécialisé qui doit maintenir du personnel pendant les heures creuses (c’est plus facile pour les boulangeries, supermarchés ou cafés pour qui la restauration rapide est une activité annexe). Le respect de la réglementation et notamment des règles d’hygiène et de sécurité. Et, pour les chaines notamment, la notoriété (qui passe par un effort publicitaire qui peut être important). Enfin, la maîtrise des coûts passe par une optimisation des frais de personnel (le plus gros poste, souvent 1/3 des coûts) avec recours à des temps partiels, et un contrôle des coûts matière (le deuxième poste, env. 25% des coûts) avec standardisation des produits et limitation de l’offre. Loin derrière McDo, une dizaine de chaines à plus de 100 MEUR
Le classement est un peu différent en nombre d’établissements du fait de la grande taille des restaurants de McDonald’s (3,4 MEUR / établissement) et Burger King (4,7 MEUR) par rapport à Subway (nombreux petits établissement de 0,4 MEUR), Broche Dorée (0,6 MEUR) ou Mie Caline (0,7 MEUR). Malgré ces performances un peu décevantes les dernières années, le groupe conserve une rentabilité robuste et son EBITDA couvre très largement les investissements (chiffres McDo Europe dans le graphique ci-dessous). Quick, bientôt Burger King
Depuis le LBO, Quick a lancé un vaste programme de rénovation et restructuration de son réseau de restaurants (avec fermeture d’établissements peu performants).
Ce qu’il faut retenir sur la restauration rapide en France Un secteur porteur qui a bénéficié d’une croissance exceptionnelle jusqu’en 2011, tiré par l’évolution du mode de vie des Français, mais qui traverse un passage à vide temporaire lié à la baisse du pouvoir d’achat ; Une offre pléthorique de nouveaux entrants (auto-entrepreneurs aussi bien que chaines) qui exacerbe la concurrence et conduit à de nombreuses défaillances ; Un marché atomisé où 60 000 très petites entreprises côtoient 2 700 PME et quelques ETI ; Une douzaine de chaines de plus de 100 MEUR, aussi bien de type anglo-saxon (dominées par McDonald’s, suivi de loin par Quick), que de type « à la française » (Paul, Brioche Dorée, la Mie Caline…) ; Et Quick, qui n’a pas su se désendetter après un LBO trop chargé, et qui va être repris par Olivier Bertrand pour intégration au réseau Burger King. Dans les années qui viennent, les restaurants vont devoir continuer d’adapter leur offre aux souhaits de clients devenus plus exigents sur les prix et la qualité ; les chaines ont de bons atouts pour continuer de progresser rapidement dans un marché encore atomisé qui doit renouer avec la croissance dès que les effets de la crise s’estomperont. Cet article a été rédigé à partir d’une étude Finalysis sur ce secteur de l’économie française |