Selon Antoine de Saint-Exupéry : “vous ne pouvez commandez ces gens que si vous les aimez”. Les dirigeants qui aiment leurs équipes, qui considèrent les femmes et les hommes qui composent leurs organisations autrement que comme des indicateurs ou des centres de coûts, qui osent une vraie relation humaine qui dépasse la politesse professionnelle existent et atteignent des résultats à rendre jaloux. Vous en doutez ? (publié initialement dans le Peoplesphere 193)
Don’t manage. Love
Ne pas gérer mais apprendre à aimer ses collaborateurs et ses collègues. Voilà un changement de paradigme qui décoiffe. Et pourtant, quoi de plus normal et de plus naturel. Nous passons plus de temps au bureau que de temps avec notre famille et nos amis. Nous savons également pertinemment que la qualité de la relation avec ses collègues et son boss est un facteur essentiel dans la rétention des talents et nous nous délectons d’un esprit d’équipe serein et solidaire. Il est considéré comme normal de sympathiser avec ses collègues. Pourquoi faudrait-il que nous continuions à déshumaniser nos relations hiérarchiques sous prétexte que les écoles de management nous abreuvent de bons conseils (gardez vos distances) ou que la force de l’habitude nous pousse à souffrir de schizophrénie en ayant une personnalité pour la maison et une pour le bureau. Vous ne trouvez pas ça épuisant, vous, d’être schizophrène?
Des chiffres et des faits
Plus fort encore que le poids d’une bonne santé mentale, c’est le choc des chiffres. Mettre les collaborateurs et leur bonheur au centre des préoccupations de l’Entreprise serait source de profit et de croissance durable. Dans une économie morose et déprimante, voilà de quoi donner la pêche aux managers de tout niveau.
Une utopie? Hélas non, chers sceptiques : une réalité chiffrée.
En février 2015, la Belgique et la France découvraient le film de Martin Meissonnier, le Bonheur au Travail, co-produit par la RTBF et ARTE. Dans ce documentaire, le réalisateur met en évidence des sociétés à travers le monde qui cultivent le Bonheur au Travail. Et les résultats atteints par ces entreprises dépassent toutes les prédictions. Meilleure performance, meilleurs résultats financiers, plus de parts de marchés, plus haut biveau d’attraction, meilleure réputation en tant qu’employeur, plus d’engagement… Ce sont là bien là des indicateurs qui parlent tant aux Conseils d’Administration qu’aux dirigeants soucieux de la bonne santé de leurs entreprises.
Si vous doutez de la véracité de ces affirmations, n’hésitez pas à vous intéresser aux cas de la biscuiterie Poult (+ 12% de croissance dans un marché à -2%), des spécialistes des réparations de flexibles Chronoflex (+15% de chiffres d’affaire dès la mise en place d’un système de rémunération décidé par les collaborateurs eux-mêmes), de la fonderie FAVI (+ 60% de parts de marché et leader mondial dans son domaine), la société de services informatiques HCL Technologies (qui a triplé son effectif passant de 30.000 à 90.000 personnes et dont le CEO a sorti un best seller “Employees first”). Que dire également du Ministère belge (SPF) de la Sécurité Sociale dont nous avons évoqué de nombreuses fois les résultats récurrents positifs dans les domaines financiers, écologiques, opérationnels et bien sûr humains? Si ça marche dans un ministère, quelles seraient les bonnes raisons que cela ne fonctionne pas chez vous? La raison trop souvent invoquée, c’est le “Top Management”. Ce fameux Top qui a d’autres occupations, qui ne voudra jamais, qui “ho… vous savez bien…”. Et pourtant…
Que peut-on apprendre de ces leaders qui aiment leur équipe?
Un dirigeant qui aime ses collaborateurs, ce n’est pas si rare même si, souvent, il ne le dit pas, peut-être par pudeur. Et ceux qui s’expriment sans réserve sur le sujet ont généralement le bonheur de recevoir en contrepartie une dose d’amour au moins aussi grande que celle qu’ils donnent. Oui, il faut donner pour recevoir et l’investissement du premier pas est rapidement rentabilisé. Prenons exemple sur quelques patrons des plus inspirants…
Mark Sebba
Mark Sebba est le CEO le plus aimé au monde. Ce qualificatif, il l’a obtenu de la part de ses collaborateurs le jour de son départ à la retraite.
Mark Sebba est un financier qui, en 2003 est devenu le CEO de Net-a-Porter, une société de vente de vêtements de luxe en ligne. Il a contribué à la croissance phénoménale : un petit 6 millions en 2003 au chiffre d’affaires impressionnant de 550 millions en 2013. La société a été évaluée à 2,5 milliards de livre sterling au début 2014. Rien que ça.
Mark Sebba est un homme discret, un bosseur. Un innovateur. Un preneur de risque qui a lancé différentes start-ups (Mr. Porter, Outnet.com) et le premier magazine de mode en ligne complètement “shoppable”. Une révolution dans les magazines de mode.
Mark Sebba, est un CEO dont le bureau est tout simple, sur un paysager, au milieu de ses troupes.
Sa présidente du Conseil d’Administration ne tarissait pas d’éloges sur ses qualités d’intégrité, de sagesse, de force et d’accessibilité. C’est également ce qu’en disent les 2500 employés à travers le monde. Pour vous en convaincre définitivement, visionnez la vidéo que nous avions postéeici.
Thierry Marx : “Oui au management de l’amour”
Si vous avez la chance de rencontrer Thierry Marx (chef étoilé au parcours atypique, jury sévère mais juste de Top Chef) et d’entreprendre avec lui une conversation sur le management, vous serez autant emportés qu’à la découverte de ses plats.
Ecouter Thierry Marx, c’est être captivé par la justesse de ses propos, lui qui est pétri d’amour pour ses équipes et de respect pour ses clients. Car Thierry Marx le dur, l’exigeant parle d’amour au travail. Il vous encourage à développer des relations d’amour et d’amitié au travail, même en tant que manager. Selon lui, le leader social est celui qui est la courroie de transmission de l’épanouissement personnel et professionnel de ses collaborateurs. La finalité de l’existence de sa fonction est de tirer le meilleur de chacun pour contribuer aux objectifs collectifs. Enfin, Thierry Marx encourage le Bonheur au Travail : le Bonheur est ce qui fait oublier la peur et la peur est source d’échec.
Thierry, Frédéric, Michel, Nicolas, Frédéric et les autres…
Lors des Journées du Bonheur au Travail organisées à Paris en février, j’ai eu le plaisir d’animer une table ronde avec 5 dirigeants d’entreprises françaises : Thierry Gaillard, CEO d’Orangina Schweppes, Frédéric Lippi, président du Conseil d’Administration de Lippi (PME de l’année 2012 et Entreprise de l’année en transformation digitale 2014), Nicolas Peltier, CEO d’Anatole (leader européen du telecom expenses management), Frédéric Peduzzi, CEO de Peduzzi Constructions et Michel Hervé, fondateur et président du Groupe Hervé (plus de 30 sociétés).
La conclusion de ces 5 dirigeants était unanime : si vous ne croyez pas au Bonheur au Travail, si vous n’êtes pas convaincus du bien fondé de la démarche, n’y allez pas. Surtout, n’y allez pas! Mais préparez-vous à ce que votre business meure à plus ou moins court terme.
Leur message est sans équivoque : un vrai leader connaît son équipe, apprécie chacun de ses membres pour ce qu’il ou elle est. Un vrai leader agit avec ses collaborateurs et ses clients comme il agit avec ses proches : il est courageux, sincère, généreux, humble. Il a de l’humour et il est sur le pont quand la tempête souffle. Il prend les décisions qui s’imposent et est fier de mettre son équipe en situation de succès. Il se réjouit du succès collectif et est intraitable avec l’arrogance individuelle.
Le déclic
Ce n’est peut-être pas naturel d’être un leader inspirant lorsqu’on a, pendant des années, mené ses troupes à la baguette, avec carottes et autres coups de bâtons. Lorsqu’on a infantilisé ses collaborateurs. Lorsqu’on s’est épanoui dans un climat de compétition et de méfiance. Ou lorsqu’on a au-dessus de soi un handicapé des relations humaines obnubilé par ses chiffres et ses rapports.
D’expérience, ces leaders qui ne rougissent pas lorsqu’on leur parle d’amour parlent d’un déclic. Il s’agit d’une rencontre, d’un accident de vie, de l’envie de ravir, du besoin de dépasser son intérêt propre. Qu’importe.
Mais une fois le déclic enclenché, c’est comme avoir sauté d’un avion pour un saut en chute libre : il n’y a pas moyen de revenir en arrière. Il s’agit d’appréhender, avec sagesse et bienveillance, ce nouvel état d’esprit : un leader aimant est un leader performant.
Don’t manage. Love… parce tous ceux qui nous entourent le valent bien !