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Un an après la levée de fonds: lune de miel ou gueule de bois?

Si les articles sur la préparation à la levée de fonds foisonnent dans les médias, force est de constater que la période post-levée reste peu connue, voire même intrigante pour les entrepreneurs n’ayant pas encore levé avec des fonds d’investissement. Une fois les bans publiés et les médias passés à un autre sujet, comment s’amorce la relation entrepreneur-investisseur? Quels sont les changements vécus par les entrepreneurs au cours des 12 mois suivants la levée? Chausson Finance vous relate cette période à travers différents témoignages de nos clients.

Les entrepreneurs interrogés convergent tous sur l’idée qu’un investisseur permet de structurer une société avec notamment la mise en place d’un board professionnel avec des comptes à rendre régulièrement. L’entrepreneur n’est ainsi plus seul et s’échappe de l’opérationnel l’espace d’un moment. Au-delà des traditionnels reportings, l’investisseur impose une mise au carré de l’ensemble des éléments juridiques et comptables de la société. Toujours positive, l’implication des fonds d’investissement varie fortement en fonction de l’ADN du fonds. Certains se contentent de poser les «bonnes questions» tandis que d’autres préparent minutieusement leurs boards challengeant la stratégie du dirigeant et ses alternatives possibles. Quoiqu’il en soit, les entrepreneurs interrogés conseillent de se montrer pro-actifs pour bénéficier de l’expérience des investisseurs sur des sujets précis.

L’implication business dépend, là encore, beaucoup de l’ADN du fonds à bord. Alors que certains sont inactifs ou presque, d’autres vont jouer un rôle plus ou moins importants. Parmi les fonds actifs, la majorité travaille sur l’identification de profils en vue de renforcer l’équipe. Plusieurs entrepreneurs interrogés ont ainsi reçu des candidatures pertinentes via leur investisseur. La plupart des fonds mettent en relation les sociétés de leur portefeuille entre elles pour nouer des partenariats ou tout du moins pour des échanges de bonnes pratiques. Plus rarement, certains fonds introduisent des clients ou partenaires commerciaux potentiels. Par extension, le concept émergent de «platform» à la Andreessen Horowitz se retrouve chez quelques-uns. Ces derniers ont embauché des experts (financiers, communication) pour aider les sociétés de leur portefeuille. Ils octroient également du temps des analystes à la recherche d’acquisitions et/ou à la génération d’études de marché pour évaluer telle ou telle zone géographique.

 


Il est difficile de trouver des points négatifs quand l’on interroge les entrepreneurs. Les 12 mois suivants la levée semblent correspondre à une sorte de «lune de miel». Les éléments négatifs sont périphériques à la relation Investisseur-Entrepreneur. Deux cas de figure ressortent: les relations nouveaux Investisseurs – investisseurs historiques peuvent ainsi être tendues à cause d’une divergence d’intérêts et d’ambitions pour la société. Autre sujet, certains partenaires commerciaux et potentiels salariés pensent que la société regorge d’argent du sol au plafond, avec les conséquences que l’on peut imaginer dans les négociations.

Ce qui nous a marqué en travaillant sur cet article est le fait que les entrepreneurs avaient tous choisi des fonds en adéquation avec leur ADN et pas uniquement en fonction de la valorisation. Les entrepreneurs souhaitant une grande implication de leur investisseur ou au contraire privilégiant leur liberté ont tous été servis. Et force est de constater que les investisseurs ont tenu leurs engagements, aux niveaux stratégique, structurel et opérationnel. Faire remonter des aspects négatifs ne fut pas simple. La période de 12 mois, sorte de «lune de miel», explique ce constat tout comme le bon matching entre l’entrepreneur et son investisseur. Quel regard porterait les entrepreneurs au bout d’une période plus longue?!

Par Romain Dehaussy, directeur de Chausson Finance

 

Comment tirer profit de la relation entrepreneur-investisseur?

En phase de levée, certains entrepreneurs sont obnubilés par la valorisation au détriment de la valeur ajoutée apportée par le VC. A tort, puisque les grands succès se construisent autour d’une relation privilégiée entre l’entrepreneur et un VC « smart ». Les entrepreneurs doivent donc opter pour la meilleure valorisation et le meilleur VC possibles.

Cherchez un profil d’investisseurs conforme à vos ambitions

L’entrepreneur avisé planifiera ses rounds de financement en fonction de l’exit souhaitée. Devenir une licorne nécessitera de lever avec un fonds américain prestigieux. Maximiser ses chances de réussite se prépare dès le round A. Signez avec un fonds français reconnu permettra d’accrocher plus facilement un fonds européen reconnu puis un fonds américain « top tier ». Criteo a ainsi signé successivement avec Idinvest, Index pour finir avec Bessemer. Dans un marché normé comme celui du venture, la théorie du signal s’applique pleinement. Chaque nouvel investisseur étudiera attentivement le « pedigree » des investisseurs présents et leur capacité à collaborer ensemble. C’est lors du dernier meetup de Point Nine Capital que sa participation Algolia a renforcé ses liens avec Accel Partners… quelques semaines avant la conclusion d’un round B de 18 millions de dollars !

Plus généralement, un fonds « top-tier » permet à ses participations de renforcer leurs crédibilités auprès de leurs écosystèmes. Bessemer a permis à Criteo d’asseoir sa crédibilité aux USA. Celle-ci s’est traduite par la facilité à recruter des managers américains jusque-là insensibles à la pépite « frenchy ». Bessmer a également permis de maximiser la valorisation lors de l’IPO, les investisseurs américains étant, là-aussi, plus réceptifs.

Au sein du fonds, collaborez avec un partner reconnu

Le fonds est représenté au board de la société par l’un de ses partners. Lors des décisions stratégiques comme les réinvestissements, c’est lui qui portera le dossier devant le comité interne du fonds. Sélectionner un fonds doit donc prendre en compte l’interlocuteur au quotidien… au risque d’être considéré comme une participation de second rang.

L’investisseur sera plus ou moins impliqué dans l’accompagnement de ses participations. Cette implication varie en fonction de la typologie du fonds, du montant investi, de l’âge du fonds… L’investisseur apporte son expertise qui peut s’exprimer par une connaissance du secteur et/ou des sujets inscrits dans la road map.

Ainsi, un entrepreneur se posera vraisemblablement la question du développement aux USA une fois dans sa vie alors que l’investisseur y aura déjà été confronté à plusieurs reprises via ses participations. A lui de partager les bonnes pratiques. Dans un autre domaine, Xavier Lorphelin de Serena Capital est très actif sur la stratégie de build-ups de ses participations telle Augure allant jusqu’à s’occuper de la négociation avec les cibles identifiées.

La valeur ajoutée se traduit aussi par la mise à disposition du carnet d’adresses de l’investisseur. Chez Point Nine, 50 CTOs de leurs participations échangent entre eux quotidiennement sur une plateforme dédiée. Last but not least, la coopération durant en moyenne 5 ans, autant faire équipe avec un investisseur avec qui il y ait un feeling !

Les entrepreneurs «successful» vous le confirmeront ; leurs VCs ont fortement contribué à leur succès de par la valeur ajoutée apportée. Celle-ci est un mix entre l’aura du fonds, la capacité à accompagner dans la durée, les compétences, le carnet d’adresses et l’implication du partner en charge du dossier. Lors de la comparaison de term-sheets, la valeur ajoutée du fonds et du partner est donc un critère de sélection tout aussi important que la valorisation. Certains entrepreneurs acceptent même des valorisations inférieures provenant de VCs « top tier ».

Par Romain Dehaussy, directeur de Chausson Finance

 

Création d’entreprise : 3 phases – 3 états émotionnels

creation entreprise

 

De l’émergence de projet jusqu’au rythme de croisière de votre entreprise ; de l’introspection des débuts à l’ascenseur émotionnel du démarrage, quels sont les trois états esprits de la création d’entreprise ? Comment les aborder ?

 

I. De l’émergence de projet à la décision de créer : un moment d’introspection

D’une idée de longue date à une opportunité qui vous tombe sous le nez en passant par un moment d’inactivité où vous songez à créer votre propre emploi. L’aventure entrepreneuriale peut débuter sous diverses formes et suite à de nombreuses situations.

Aucune ne vaut plus qu’une autre, mais, quel que soit l’élément déclencheur, certaines questions existentielles sont à élucider dès l’arrivée d’un embryon de volonté d’entreprendre.

Avez-vous la personnalité d’un dirigeant ? À savoir l’envie de toucher à tout, au-delà même de votre cœur de métier ? De suivre votre trésorerie, prendre des décisions de gestion, de prospecter, fidéliser, anticiper… D’être sans cesse sur le terrain, de peaufiner votre réseau ?

Prenez également le temps de valider avec vos proches ce changement de vie et de rapport à l’argent :moment introspection création d'entreprise

  • quel budget pouvez-vous investir au démarrage de votre entreprise ? 
  • avez-vous de l’argent de côté ?
  • quelle sera votre rémunération minimum à tirer de votre activité pour pouvoir vivre ?
  • Combien de temps vous donnez-vous à « essayer » votre projet avant de devoir changer de cap ?
  • Quel est votre plan B ?

Une création d’entreprise est un changement radical de rythme de vie, de façon de penser… Pour réussir, vous devez vous sentir prêt psychologiquement, mais aussi financièrement.

De même, vous devrez valider un minima votre projet de création d’entreprise, surtout si vous vous lancez dans un secteur d’activité et /ou un métier que vous connaissez très peu.

Vous souhaitez ouvrir un restaurant, mais vous ne disposez d’aucune expérience dans ce domaine ?Pourquoi ne pas chercher un stage de quelques semaines pour mettre la main à la pâte et vérifier que ce quotidien vous plaira ? De même, n’hésitez pas à interviewer des professionnels, à retracer leurs tâches de chaque jour…

L’objectif étant de vous projeter dans cette nouvelle vie, sans fantasme ni vision sublimée de la réalité.

II. Je créé mon entreprise : gare à l’ascenseur émotionnel !

Votre décision est prise : vous créez votre entreprise !

De nombreuses démarches vous attendent et nous vous recommandons de suivre une méthodologie stricte.

De l’étude de marché à la réalisation du business plan, en passant par les prévisions financières, le choix du statut juridique, les formalités d’immatriculation… Sachez que toutes ces étapes vont vous entraîner dans un quotidien haletant fait de doutes, de réflexions intenses et de moments d’actions

Vous allez engager vos premiers investissements, chercher des professionnels pour vous aider,découvrir vos points forts et vos points faibles, mais aussi certains aspects de votre projet que vous n’aviez pas encore envisagé ; revoir votre offre des dizaines de fois !

Vous allez nouer vos premiers partenariats commerciaux et rencontrer des financeurs,développer votre réseau. Certains vous approuveront, d’autres vous mépriserontDe grandes joies et mini victoires aux grands moments de solitudes, de remises en question, voire de démotivation totale…

Tous les entrepreneurs sont d’accord, la phase de création d’entreprise et du démarrage de l’activité sont des moments propices à un ascenseur émotionnel de haute voltige. Il va falloir apprendre à gérer vos émotions.

ascenceur émotionnel D’abord, l’entrepreneuriat est un marathon. Prenez donc le temps de souffler pour repartir du bon pied. Apprenez à lâcher prise, à vous poser les bonnes questions, à accepter les échecs et à en tirer des leçons.

Si votre plan de route a bien été ficelé dans la première phase d’émergence de votre projet, vous saurez jusqu’où vous pourrez aller (financièrement, en matière de temps et de prise de retard).

Enfin, parce que petit à petit, l’oiseau fait son nid, n’oubliez pas de fêter chaque mini-avancée (vos formalités finalisées, votre site internet mis en ligne…). Grande ou petite, chacune de ces étapes vous rapproche de votre objectif !

 

III. Phase 3 : le rythme de croisière, je consolide avant de repartir de plus belle

Votre activité est mise sur les rails, vos premiers clients fidélisés et vous atteignez enfin votre rythme de croisière en matière de gestion du temps, du stress, de vos finances. Tout va bien, mais,ne vous endormez pas sur vos lauriers !

Sachez anticiper les catastrophes ! Ce peut être l’arrivée d’un concurrent, une évolution de réglementation relative à votre cœur de métier… La phase de consolidation est le bon moment pour revoir (ou mettre en place si cela n’est pas déjà fait) un système de veille de votre secteur.

Vous pouvez aussi faire le point sur vos outils, logiciels et tableaux de bord de gestion. Sont-ils appropriés ? Faut-il revoir certains aspects de votre entreprise ? Peut-être que votre site internet, monté avec peu de moyens, mériterait un petit coup de peigne afin d’augmenter en professionnalisme. Peut-être que vous ne maîtrisez toujours pas le calcul de votre seuil de rentabilité et qu’une formation courte serait la bienvenue, que vos plaquettes de prospection pourraient être perfectionnées, votre discours commercial peaufiné…

Eh oui, bien souvent, les premiers deniers gagnés sont immédiatement réinvestis dans le fonds de roulement de l’entreprise.consolider son entreprise

Profitez de ce premier temps de stabilité pour faire deux points :

  • Les fameux réajustements évoqués ci-dessus
  • Mais aussi la mise en place d’une vision stratégique à long terme ou la reformulation de vos objectifs, peut-être un peu oubliés durant la phase haletante de création. Quelles seront les prochaines étapes ? Quel chemin souhaitez-vous emprunter pour développer votre activité ?

Oui, il est temps de lever le pied, mais ne perdez pas de vue vos ambitions de développement et profitez du « calme » pour mettre en place votre prochaine stratégie.

De plus, le quotidien d’un dirigeant étant bien rempli, des breaks réguliers sont nécessaires pour ne pas tomber dans un stress permanent et dangereux pour la pérennité de votre entreprise !

D’ailleurs, la communauté entrepreneurs ne cesse de le rappeler : « la troisième vie » (pour activité professionnelle – activité en famille – activité de loisir) est salvatrice pour le moral des troupes et une gestion harmonieuse de son entreprise.

À bon entendeur… nous vous souhaitons une belle aventure entrepreneuriale !

d’après le blog du dirigeant

 

Faire un business plan : est-ce un bon plan ?

  • Christophe Garonne, Professeur d’entrepreneuriat IESEG, directeur l’incubateur institution, tord cou idées reçues business plan.

    Christophe Garonne, Professeur d’entrepreneuriat à IESEG, et directeur de l’incubateur de la même institution, tord le cou des idées reçues sur le business plan. – D.R.

Christophe Garonne, Professeur d’entrepreneuriat à IESEG, et directeur de l’incubateur de la même institution, présente les recommandations tirées d’une étude de recherche, pour laquelle plus de 600 start-up ont été interviewées pendant trois ans. Les résultats complets seront publiés dans un ouvrage à paraître en septembre 2016 chez Emerald .

« Vous créez une entreprise ? Montrez-moi votre business plan ! » Tous les entrepreneurs ont un jour entendu cette phrase. Une simple requête sur internet avec « business plan » renvoie des millions de résultats. Rédiger un business plan semble l’étape obligée du parcours d’un entrepreneur. En réalité,  seul un entrepreneur sur deux rédige un business plan.
Si Internet fourmille d’informations sur la manière de rédiger un busines plan, quelles sections inclure, etc., il existe peu de conseils sur le pourquoi : « pourquoi faire un plan ? », « quel type de plan rédiger ?» et « que peut-on attendre d’un business plan ?» …  Après avoir suivi plus de 600 start-up de toutes industries pendant trois ans, Christophe Garonne livre ses résultats et propose des recommandations. Pour Les Echos Entrepreneurs, il fait le tour des idées reçues sur le business plan.

#1 Faire un business plan est un facteur clef de succès

Non, un business plan n’est pas obligatoire pour réussir. Si la rédaction d’un business plan permet à la start-up de mieux se connaître et de mieux se faire connaître auprès de ses partenaires potentiels, un plan ne garantit en rien le succès et l’absence de plan ne conduit pas à l’échec.

#2 Faire un business plan est nécessaire pour attirer les investisseurs

Oui et non. Un business plan est demandé lors du dépôt d’un dossier de financement par la grande majorité des institutions. Il permet aux investisseurs de se faire une première idée du projet avant de rencontrer les entrepreneurs. En revanche, il est une condition nécessaire mais pas suffisante pour une levée de fonds. De nombreuses études ont montré que les investisseurs réagissent de manière intuitive plutôt que rationnelle lors des premiers stades de financement d’une start-up.

#3 La longueur du business plan est un point fort

Pas nécessairement. Il existe autant de plans que d’entrepreneurs. En revanche, la formalisation du plan est un élément important pour le succès d’une start-up. Les résultats sont très clairs sur ce point. Les start-up avec des plans informels, rédigés à la va vite sur un bout de papier sont celles qui ont le moins de chances de réussite. Pour dire les choses autrement, il est préférable de prendre le temps nécessaire pour rédiger un plan de qualité, bien réfléchi qui colle aux problématiques de la start-up et de son environnement.

#4 Le premier objectif d’un business plan est d’obtenir un financement

Contrairement à une idée reçue, sur l’ensemble des entrepreneurs en phase de création, seule une minorité écrit un business plan pour attirer des financements. Le premier objectif de la rédaction d’un plan est de pouvoir mettre ses idées à plat et d’identifier des solutions potentielles pour les obstacles à venir. Le 2e objectif est de créer un plan d’actions qui va rythmer la progression de la start-up et mobiliser les membres de l’équipe avec des objectifs clairs à atteindre. Le 3e objectif est de pouvoir communiquer efficacement les éléments clefs du projet en interne – pour fédérer une équipe – et en externe – pour attirer des partenaires potentiels-.
Ainsi, faire rédiger son business plan par un prestataire externe n’est pas forcément une bonne chose car il ne permet pas de prendre de la hauteur sur son projet entrepreneurial et de se poser les bonnes questions. Le processus de planification est au moins aussi important que la réalisation du plan en soi.

#5 Rédiger un business plan ne sert à rien : à peine écrit, il est déjà obsolète

C’est un commentaire qui revient souvent chez les entrepreneurs, à juste titre. Nous vivons dans un monde où les conditions économiques changent très rapidement. Se lancer dans la rédaction d’un business plan doit se voir comme une pratique dynamique qui ne s’arrête pas une fois le plan terminé. Pour tirer tous les bénéfices de leur business plan, les entrepreneurs doivent le réviser régulièrement. Cette révision du plan est un facteur clef de succès très important chez les entrepreneurs qui décident de planifier.

Pour résumer : si vous décidez de planifier, prenez le temps de faire un plan abouti, révisez le régulièrement,  et surtout n’oubliez pas qu’aucun business plan aussi détaillé soit-il ne remplacera l’action sur le terrain, élément clef du succès d’une entreprise, petite ou grande.
GERALDINE DAUVERGNE

 

Mûrir son projet : un bilan de soi pour trouver sa voie

  • Vincent Avanzi, conférencier poète d'entreprise, propose méthode faire mûrir projet trouver voie.

    Vincent Avanzi, conférencier et poète d’entreprise, vous propose sa méthode pour faire mûrir votre projet et trouver votre voie. – shutterstock.com

L’été est propice aux remises en questions… Et si vous profitiez de l’été pour faire un petit bila, pour vous assurer que vous êtes sur la bonne voie dans votre projet entrepreneurial ?

 

Je suis aujourd’hui conférencier et poète d’entreprise. J’ai mis dix ans à trouver ma voie. Comment ? En explorant des voies pour trouver enfin la mienne, celle qui me correspond, celle qui me ressemble, celle qui réunit au final tout moi « moi ». Le parcours est parfois long et sinueux mais il est rempli de belles découvertes, rencontres et apprentissages. Alors voici une technique pour, vous aussi, trouver ou même créer votre voie.

Au début, tout part du rêve. Walt Disney disait que « tout ce qui peut être imaginé est réel » et William Blake que« l’homme est imagination ». Et comme le rêve fait intrinsèquement partie de la vie, commencez par vous octroyer le droit de rêver. Rêver de votre vie d’avenir, de votre idéal, dans le champ des possibles, pour voir l’horizon infini s’ouvrir à vous, sans aucune barrière mentale.  Pour cela, rien de tel que vous projeter dans l’avenir, en vous visualisant à horizon d’un an, trois ans, cinq ans, dix ans, vingt ans… On verra ensuite si cela est réellement envisageable et quand.

Ensuite, au-delà du rêve in vitro, je vous propose l’exercice suivant : plus qu’un bilan de compétences classique, un bilan de soi, à faire dès aujourd’hui pour entrevoir des voies possibles d’entrepreneuriat. Sur une feuille, dessinez trois colonnes : vos savoir-faire, vos savoir-être et vos envies. ensuite nous ferons la somme des trois pour envisager un plan d’action.

#1 Vos savoir-faire = vos compétences

Vos compétences sont à la fois professionnelles et personnelles: ce que vous savez faire, ce que vous pouvez apporter à une organisation, à un marché ou au monde. Toutes les « skills » sur lesquelles vous pourrez bâtir votre avenir, par exemple : les langues que vous maitrisez, les différentes fonctions que vous avez occupées en entreprise ou dans une organisation, votre formation, votre art si vous en pratiquez un, les hobbies qui vous occupent, etc.

Faites une liste et trouvez en au moins dix ! Soyez patient, en creusant, vous en trouverez forcément plus. N’hésitez pas à demander à un proche. Il s’agit de tout ce que vous savez faire, non pas seulement de ce qui peut être utile, mais bien ce que vous savez faire. Et si vous identifiez en même temps des compétences que vous souhaiteriez acquérir, et qui vous semblent essentielles, alors notez-les d’ores et déjà dans la colonne des « envies ».

#2 Vos savoir-être = vos talents

Ce sont vos dons, vos qualités, vos talents… qui vous êtes réellement, à la fois intrinsèquement et en relation avec les autres. Vous en possédez plein… c’est certain! Pour vous aider, pensez à la manière dont les autres vous décriraient. D’ailleurs, n’hésitez pas à leur demander. Voici quelques exemples de forces et de « soft skills » : le relationnel, le leadership, l’optimisme, l’humilité, l’écoute active, la créativité, le travail en équipe, le sens du détail, l’empathie, le goût de l’aventure, l’apprentissage, la spiritualité, la persuasion, la négociation, la planification, le courage, l’ouverture d’esprit, l’adaptabilité, la communication, l’humour, la reconnaissance, l’envie d’amélioration, le passage à l’action, la stratégie, l’innovation, l’autonomie, l’authenticité, la résilience, la recherche de solutions, le pardon, l’éthique de travail, la gentillesse, etc.

#3 Vos envies = vos rêves

Ce sont vos désirs de réalisation, vos rêves, vos souhaits pour l’avenir, tout ce dont vous avez envie pour préparer votre avenir.  Cela peut être à court, moyen ou long terme. Quelques exemples : une formation, un voyage, un secteur d’activité, une reconversion de métier, un nouveau secteur d’activité à explorer, une levée de fonds pour un projet, un lieu d’habitation différent, une envie d’avoir un impact sur telle ou telle chose, etc. Faites-vous plaisir, c’est votre journal intime et vos rêves à venir. Veillez toutefois à ce que certains de vos envies restent accessibles et nouvelles dans votre vie.

#4 La réunion des trois = votre voie

Maintenant, vous avez trois colonnes bien remplies. Relisez-tout, prenez le temps d’apprécier. Puis, commencez à connecter chaque ligne pertinente avec d’autres, afin de voir ce qu’il en ressort. Quand vous allez faire la somme du tout, vous obtiendrez sans doute de nouvelles voies possibles à explorer. L’avenir commencera alors à s’éclaircir vers un chemin à prendre soit pour ajouter des talents ou des compétences dans votre activité actuelle, soit pour envisager une autre voie qui vous correspond davantage, soit pour commencer dès maintenant à agir pour réaliser vos rêves. Bienvenue dans l’alignement de vos planètes, vous pouvez entreprendre votre vie et votre projet d’avenir dès aujourd’hui.

#5 Votre horizon = votre plan d’action

Enfin, il est venu le temps de tracer votre plan d’action à l’horizon de plusieurs années. Une reconversion, une nouvelle entreprise, une levée de fonds, un pivotage de votre start-up, une rencontre, une expatriation. A vous de définir votre projet et les différentes actions à mener dans les prochains jours, semaines, mois, années pour y parvenir. Prenez le temps de la réflexion et de la digestion. Et surtout, prenez l’engagement de commencer ces actions ! Rome ne s’est pas faite en un jour, votre avenir entrepreneurial non plus. Alors patience et persévérance dans la co-errance.

Bon voyage dans votre avenir et dans votre voie ! N’hésitez pas aussi à tenter des choses, à tester des chemins de traverse. Il faut parfois explorer des voies différentes pour trouver véritablement la sienne au bout du « conte ». C’est le premier jour du reste de votre vie, alors faites le premier pas dès aujourd’hui, quel qu’il soit, petit et accessible, soyez en chemin. C’est quand vous sortez de votre zone de confort que la magie opère, alors laissez cette magie vous envahir. Une nouvelle entreprise est née. Enfin, vous pouvez à partir de là définir votre nouvelle mission de vie, une phrase, un horizon, un verbe d’action. Ce sera votre cap qui guidera le sens de votre parcours à venir, la raison d’être et de faire.

L’auteur
Vincent Avanzi est développeur de richesses humaines, poète d’entreprise et fondateur de La Plume Du Futur. Auteur des livresSur la route de soi et Le Bien-Etre Plan des entrepreneurs, il accompagne les entreprises au travers de coaching et de conférences poétiques sur l’éveil des talents créatifs et l’intelligence collective.

CHRISTOPHE AVANZI

7 bonnes raisons de ne pas créer sa startup seul

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Pourquoi être solo-entrepreneur est si difficile ? Quel est l’intérêt de trouver un bon cofondateur ? Pour quelles raisons devrait-on ne pas entreprendre seul ? Jonathan Levitre, fondateur de l’application MyTwist, revient dans un post Medium sur la fermeture de sa startup. Un échec qu’il attribue en grande partie au fait de s’être lancé seul dans l’aventure entrepreneuriale.

Un dimanche soir de mai je prenais la décision de jeter l’éponge. À vrai dire, ce n’était pas vraiment une décision à proprement parler car je ne voyais pas d’autre issue. Deux ans et demi après avoir démissionné de mon poste chez le géant mondial de l’e-commerce pour me lancer dans l’aventure entrepreneuriale, je me retrouvais simplement face à un mur. Ce dimanche, je fixais mes comptes bancaires et je devais me rendre à l’évidence : je ne pouvais plus payer mon loyer et les priorités avaient donc changé. Bien sûr comme tout chef d’entreprise prévoyant, j’ai vu arriver ce moment. Mais un entrepreneur est avant tout quelqu’un d’optimiste, quelqu’un qui persévère jusqu’au bout pensant que pour chaque problème il existe une solution. Je ne suis pas quelqu’un qui abandonne. Mais ce soir là je réalisais qu’en plus d’être complètement fauché, j’étais épuisé autant physiquement que nerveusement : je ne dormais plus, j’oubliais les anniversaires de mes proches et la seule chose à laquelle j’étais capable de penser c’était ma startup et ses problèmes. Et MyTwist était en train de me consommer littéralement. Je n’avais plus aucune bande passante pour autre chose : quand quelqu’un me demandait ce que je faisais en dehors du boulot, je ne savais même plus quoi répondre. Lorsque la fatigue et les angoisses prennent le pas sur la passion et l’enthousiasme, il devient beaucoup plus difficile d’avancer. Car la passion est probablement l’actif le plus important de l’entrepreneur.

En créant ma boîte, j’étais conscient qu’il y avait de fortes chances que celle-ci occupe les 10 prochaines années de ma vie ; alors il n’est pas envisageable de ne pas être complètement investi. Ce dimanche 8 mai, seul face à mon produit qui n’avait pas complètement trouvé son marché, je ne pouvais ignorer ce constat : je n’avais toujours pas d’équipe, j’étais ruiné, proche du burn-out, LeBonCoin venait d’annoncer le lancement d’un application imitant largement MyTwist (Swipsi) et je n’avais aucune idée de comment j’allais pouvoir franchir les prochains obstacles. Comme tout entrepreneur je déteste me retrouver sans ressources ; habitué à l’action, j’aime avoir les choses sous contrôle. Mais je n’avais plus le contrôle de mon destin.

L’échec est embarrassant ; émotionnellement, compliqué à gérer. L’éventualité d’un échec me terrorisais il y a encore quelques mois. Le pire qu’il puisse arriver était d’arriver à un point où j’allais devoir annoncer aux proches qui m’ont aidé financièrement que j’avais échoué et donc que leur investissement était perdu. Mais au delà de la déception et avec un peu de recul, la fin de cette aventure est presque un soulagement tant les 4 derniers mois furent difficiles.

Dans notre modèle culturel français l’échec est quelque chose dont il est difficile de parler. Mais j’avais besoin d’écrire ce Post-Mortem pour comprendre pourquoi je m’étais planté. Il m’est peut être plus facile de parler d’échec de part mes origines anglo-saxones qui ont probablement instillé en moi cet optimisme particulier. Et si l’expérience que je relate ici peut éviter que d’autres reproduisent les mêmes erreurs alors tant mieux. Il n’y a pas de honte à admettre qu’on s’est planté et cela ne fait pas de vous un faible. Après tout c’est en se cassant la gueule plusieurs fois qu’un enfant apprend à marcher, non ? Être entrepreneur c’est accepter ses erreurs : il n’y a pas de possibilité de prendre des risques sans prendre en compte le fait qu’on peut vivre un échec.

Dans mon parcours avec MyTwist j’ai fait de nombreuses erreurs, comme tout entrepreneur. Cependant, l’origine de mon échec repose principalement dans le fait de m’être lancé seul dans cette aventure et je vais expliquer dans cet article pourquoi. Le seul avantage d’être solo-entrepreneur c’est qu’on ne peut que s’en prendre à soi-même lorsque l’on échoue. Il n’y a personne d’autre à blâmer. Vous n’embarquez personne dans votre chute.

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MyTwist, pour qui, pourquoi ?

MyTwist est ma première société. Elle est née du constat que bien que le marché de l’occasion soit florissant, aidé par un contexte de crise, nous restons encore peu nombreux à revendre nos vêtements et accessoires de mode. Pourtant l’économie collaborative est bien dans l’air du temps et la part du revenu disponible que les Français peuvent consacrer à l’habillement se réduit d’année en année. J’avais noté un déséquilibre important entre l’effort que demande le recyclage de ses vêtements et les gains que l’ont peut espérer en retirer. Résultat, des centaines d’euros se cachent dans chacune de nos gardes-robes. Des pièces qui pourraient pourtant intéresser d’autres personnes à la recherche de la bonne affaire, d’une pièce précise ou simplement sensibles aux enjeux environnementaux largement liés phénomène du « fast fashion ». Avec MyTwist, j’ai voulu lever un maximum de freins à l’achat et à la revente d’articles de mode d’occasion en lançant une application mobile qui connecterait les femmes à tous les dressings de leur ville et en particulier à ceux qui leur ressemblent. Grâce à un algorithme personnalisé, MyTwist montre, dans un interface de type « swipe-to-like » popularisé par l’application de dating Tinder, les articles susceptibles de plaire à l’utilisatrice et situés à proximité immédiate pour des transactions en main propre. Avec MyTwist je voulais offrir un moyen simple et économique de renouveler souvent son dressing sans se ruiner ou passer par la case « fast fashion ». Utiliser les trésors cachés dans les dressings pour répondre aux envies de nouveauté et de changement de la femme moderne sans pour autant qu’elle ait à rogner sur la qualité ou à vider son porte-monnaie.

En France, le marché a été largement évangélisé par ce que j’appelais les « trois V » : VideDressing, Vestiaire Collective et Vinted. Trois acteurs proposant des catalogues gros de 6 chiffres et ayant levé plusieurs dizaines de millions d’euros. Pour autant, le potentiel du marché de la mode d’occasion féminine en ligne reste énorme : un marché qui dépasse le milliard d’euro rien qu’en France et qui connaîtra une croissance à deux chiffres sur les trois prochaines années. Le marché est loin d’être arrivé à maturité comme en témoigne les quelques 450 millions de dollars injectés ces 5 dernières années par les investisseurs dans les startups du secteur aux Etats-Unis et en Europe ou l’entrée de LeBonCoin avec une application dédiée il y a moins de 3 mois.

Par rapport à ces acteurs déjà bien installés, MyTwist se différenciait par son positionnement mobile-first, local et sa dimension sociale et ludique. MyTwist s’éloignait largement du site e-commerce classique en proposant un produit mettant l’accent sur la notion plaisir intrinsèque au shopping et à la mode (la découverte, la surprise, la discussion entre filles…) plutôt que sur des aspects fonctionnels classiques. En faisant le choix de montrer les produits un par un à l’utilisatrice, j’ai voulu construire un produit qui montrait le bon produit à la bonne personne au bon moment dans l’objectif de maximiser la liquidité de la marketplace. L’algorithme construit à cette fin constituait l’avantage concurrentiel que je souhaitais mettre en place en plus d’une dimension communautaire plus forte que chez mes concurrents.

L’application est toujours active et des transactions se font toujours en ce moment même. Les résultats atteints ne sont pas ceux que j’avais espérés mais ils restent positifs compte tenu des moyens humains et financiers engagés et pouvaient éventuellement présager d’une issue différente. Dans les prochaines semaines et 10 mois après son lancement, je vais fermer ou céder la plateforme qui compte maintenant plus de 5000 inscrites en région parisienne, plus de 10000 articles et 800 MAU (monthly active users). MyTwist figurait régulièrement dans le top 100 des applications de la catégorie Shopping les plus téléchargées de l’AppleStore en France. Sur les dernières semaines d’activité, la plateforme connaissait une croissance moyenne de 8% WoW du nombre de conversations 1:1 entre utilisatrices et a dépassé le million de swipes (ou articles vus / zappés).

Pourquoi construire une marketplace est si difficile ?

L’entrepreneuriat n’est pas l’emploi le plus stable que vous pouvez choisir, ni statistiquement le plus rentable. C’est une voie risquée pour gagner sa vie. Mais il apporte un mélange de satisfaction et d’excitation qui me correspond totalement. De nombreuses personnes sont effrayées par le risque financier dans la création d’entreprise. Ce risque existe réellement comme je peux le constater aujourd’hui. On m’a souvent dit « Tu prends un sacré risque ! C’est courageux ! ». Pour autant il est finalement assez facile de prendre des risques lorsque l’on a pas grand chose à perdre. Même quand tous vos comptes bancaires sont dans le rouge, le monde ne s’arrête pas pour autant. L’entrepreneuriat était pour moi un moyen de m’amuser, de prendre en main mon destin, de donner du sens à mon travail et pourquoi pas un jour être utile à la société en créant des emplois. C’est la satisfaction de créer réellement quelque chose, d’apprendre tous les jours énormément de choses, de relever de nombreux défis et de côtoyer plein de gens passionnants et passionnés.

En me lançant dans l’entrepreneuriat, j’avais tout à fait conscience que j’allais vivre un parcours du combattant. Il est très rare qu’un projet d’entreprise se déroule comme prévu. C’est un chemin juché d’embûches. 9 jeunes sociétés sur 10 périclitent dans les 5 premières années et sur 1000 entreprises qui se lancent, une seule atteindra un jour 10 millions d’euros de chiffre d’affaires. Or l’ambition de MyTwist, comme la plupart des produits mobiles et des places de marché qui nécessitent des volumes importants pour atteindre la rentabilité, était bien sûr internationale. C’est donc clairement le genre de volume d’affaires qui était visé. Un projet très ambitieux me direz-vous ? Tout à fait. Mais dans l’économie numérique et dans un contexte global, vous êtes obligés de viser haut si vous voulez durer et gagner.

Par ailleurs, MyTwist se lançait sur un Apple Store français avec une offre de plus d’un million d’applications. Il faut savoir que seules 1500 à 2000 d’entres-elles sont réellement utilisées de façon conséquente. Autant dire qu’il est très, très difficile de se créer une place.

“ Quoi que tu rêves d’entreprendre, commence-le. L’audace a du génie, du pouvoir, de la magie ? “

Goethe

Pour une nouvelle marque, l’acquisition de nouveaux utilisateurs/clients est difficile. Toutes les startups sont confrontées à ce problème. Ce dernier est encore plus grand quand votre business est une place de marché comme MyTwist. Une place de marché ou un business basé sur deseffets de réseau a généralement un potentiel de croissance explosif une fois qu’il a été financé et/ou a atteint sa taille critique. Toutefois, la place de marché est l’un des modèles d’affaires parmi les plus difficiles à lancer.

Les places de marché ont la particularité d’avoir à mettre en relation une offre avec une demande. Pour que la plateforme fonctionne, les offreurs et demandeurs doivent tous deux être présents. On parle souvent du paradoxe de la poule et de l’oeuf pour les marketplaces : les vendeurs ne viennent que s’ils sont certains d’y trouver des acheteurs et vice-versa. Le défi est d’amener les deux parties à rejoindre une place de marché qui, au départ, est vide.

commerce

Créer sa société nécessite d’acquérir une clientèle en lui proposant une offre. La difficulté avec une place de marché est que vous êtes confrontés à deux types de clientèle distincts : vos vendeurs ont des besoins et motivations différentes de vos acheteurs. Certains vendeurs peuvent aussi être acheteurs et vice versa mais il vous faut néanmoins avoir deux propositions de valeur distinctes. C’est comme si vous créiez deux startups en même temps. Et pour que ça fonctionne, il faut que vos « deux » startups trouvent leur public et ce, en même temps.

Pour qu’une place de marché connaisse le succès, les bons vendeurs doivent être mis en face des bons acheteurs. La probabilité que le « match » ait lieu et génère des transactions s’accroît plus ou moins à mesure que votre place de marché gagne en taille. C’est ce qui rend le lancement d’une marketplace très difficile car au début vous n’avez pas assez d’offre ou pas assez de demande pour générer les interactions qui mèneront à des transactions.

La taille critique est d’autant plus difficile à atteindre que le manque d’offre ou le manque de demande pousse certains vendeurs ou acheteurs à abandonner votre place de marché au profit d’une autre…ce qui vous renvoie au dilemme initial. Par conséquent, la construction d’une marketplace est longue et douloureuse. Il faut beaucoup de patience et le succès n’arrive jamais du jour au lendemain. Or pour être en position de lever des fonds et amener plus loin votre plateforme, vous devez pouvoir montrer un certain succès aux investisseurs. Il faut donc avoir suffisamment de temps devant soi et garder un burnrate le plus bas possible. Même les plus gros succès comme la licorne française BlaBlaCar ne se sont pas fait en un jour : leurs fondateurs ont conservé leur travail salarié 4 ans durant avant de pouvoir se consacrer à plein temps à leur startup (lire “BlaBlaCar ne s’est pas construit en un jour”).

tribune startup

Avec MyTwist, la stratégie a été de commencer à créer l’offre en ciblant une niche à la fois démographique (femmes CSP+, 25-35ans), géographique (Paris intra-muros) et de segment (haut de gamme). Sur le marché de la mode d’occasion, les vendeurs sont relativement faciles à trouver et sont plus nombreux que les acheteurs. L’idée était de pouvoir proposer plusieurs centaines de pièces couvrant différentes tailles, pointures, coloris et marques, le tout sur une zone géographique limitée et dense.

Un acheteur potentiel devait être en mesure d’avoir suffisamment de choix sur sa taille de vêtement et dans un rayon maximum de 10km afin d’être en mesure de réaliser la transaction en main propre avec le vendeur. La difficulté survient lorsque l’offre dite « suffisante » est en place. Il faut alors trouver les acheteurs et que ceux-ci trouvent aisément les produits qui les intéressent. Pour être tout à fait honnête, j’ai eu des difficultés à permettre ce matchingdans un délai raisonnable. De nombreuses vendeuses n’arrivaient pas à vendre et beaucoup s’en allaient, en emportant leurs petites annonces avec elles. Le NPS de MyTwist du point de vue du vendeur était catastrophique et atteignait timidement les 4/10. Aujourd’hui encore je ne suis pas sûr de ce qu’il aurait fallu faire : adopter une stratégie différente ou m’accorder plus de temps, les déceptions des utilisateurs initiaux étant inévitables ?

Pourquoi être solo-entrepreneur est-il si difficile ?

Il est communément admis que vous devez avoir au moins un co-fondateur lorsque vous créez une startup. Les incubateurs ou accélérateurs misent en priorité sur des équipes. Et les investisseurs en capital risque aussi. Et il y a une bonne raison à cela : si vous n’êtes pas capable de convaincre une seule personne de rejoindre votre équipe, pourquoi un investisseur le ferait ?

Avant même de me lancer, j’ai recherché à fédérer des associés autour de mon projet. En sollicitant mes amis ou en passant plusieurs mois à networker dans les meetups et autres événements quotidiens de l’écosystème parisien. Croyez moi, être solo-entrepreneur n’a pas été un choix. Si j’avais pu faire partie d’une équipe talentueuse, j’aurais signé de suite. Étant toujours optimiste, je me suis finalement dit qu’en lançant mon produit et qu’avec un peu de traction, un recrutement serait plus aisé. Bien sûr, j’ai eu quelques opportunités d’association. Mais souvent, ce n’était pas le bon timing, les bonnes compétences ou la même vision partagée.

Peu de startups à succès ont été fondées par une seule personne. Empiriquement, une très grande majorité de startups et d’entreprises établies ont une équipe de fondateurs. Microsoft, Apple, Yahoo et Google ont été fondés par des équipes de deux co-fondateurs. Et même les entrepreneurs à succès présentés comme solo-entrepreneurs (comme le fondateur d’Oracle par exemple) ont en réalité vite été rejoints par des associés.

Alors pourquoi ne pas créer sa startup seul ?

1. Garder un équilibre sain entre vie professionnelle et vie personnelle

Être solo-entrepreneur est difficile. Cela demande beaucoup de courage, du cran, de la résilience…et beaucoup de caféine. Bien sûr ce n’est pas aussi simple que ça. Comme dans tout challenge, il y a des hauts et des bas, des obstacles, des réussites, des décisions à prendre. Mais il y a une donnée qui rend la chose encore plus compliquée : vous ne pouvez compter que sur vous même. En tant que solo-entrepreneur, vous devez TOUT faire seul, du plus opérationnel au plus stratégique. Gérer les problématiques administratives, légales, comptables, assurer le service client, définir une stratégie de communication et l’exécuter, lever des fonds, trouver des idées, recruter, s’adapter au marché, piloter les projets de développement informatique, modérer du contenu, networker, nouer des partenariats et j’en passe.. Préparez vous à mettre de côté votre vie personnelle, travailler les weekends et perdre de nombreuses heures de sommeil.

Pour faire un maximum d’économies et prolonger la durée de vie de ma startup, j’essayais d’assumer tout ce dont j’étais capable de faire en dehors du rôle classique de dirigeant : créer des éléments graphiques sous photoshop, coder le site web ou le blog, distribuer des flyers… Étant plutôt touche à tout et orienté action et résultat, cela ne m’a jamais effrayé. Avec beaucoup de discipline, de rigueur et un sens aigu de la priorisation, une seule personne peut faire finalement énormément de choses dans une journée. Mais avec la croissance, la charge de travail m’a vite dépassé et il est devenu difficile de maintenir ce rythme sur la durée.

Être seul dans son entreprise c’est aussi culpabiliser lorsque vous prenez du temps pour vous reposer ou pour vos loisirs. Car pendant ce temps, personne ne prend le relais, personne ne « tient la baraque » à votre place.

Être seul c’est aussi assumer tout l’investissement financier. Ayant placé tous mes jetons dans l’entreprise, je n’avais même plus de quoi me payer une bière ou un restaurant. Etant quelqu’un d’attaché à mon indépendance, il était hors de question que quelqu’un d’autre m’invite. Résultat, je ne sortais plus beaucoup et cela m’isolait encore plus.

2. Trouver l’énergie pour traverser les épreuves et les baisses de moral

C’est probablement la dimension la plus importante. On peut se sentir très isolé quand on fonde et gère une société. Les chefs d’entreprises, artisans et commerçants font partie des plus exposés au burn-out : 10 à 20% d’entre eux présenteraient des signes inquiétants. La concurrence, les risques patrimoniaux, le stress ou les soucis de trésoreries sont autant de sujets qui peuvent peser lourd dans l’esprit du chef d’entreprise et ils sont difficiles à assumer seul. Bien sûr on peut se confier à des proches, se faire réconforter par des amis ou si on a de la chance, solliciter l’aide d’éventuels mentors ou membres de son board. Mais quand un gros problème se présente, il n’y aura que vos associés pour vous sortir de là.

En dehors de la charge de travail, être solo-entrepreneur est compliqué psychologiquement. Même si vous rencontrez du succès, vous vous sentirez rapidement seul. Je ne parlais pas beaucoup à mes proches de ce qu’il se passait réellement dans la société. Vous n’êtes pas supposé parler des problèmes, des bugs ou des difficultés que vous rencontrez dans votre croissance. Seul à représenter ma boîte, je me devais de donner une bonne image, me montrer positif. Quand quelqu’un vous demande des nouvelles de votre startup, en particulier quand c’est quelqu’un qui n’est pas expert dans le numérique ou l’entrepreneuriat et qui a tendance à ne pas comprendre pourquoi cela n’avance pas plus vite, on fait ce que tout entrepreneur a pris réflexe de faire : sortir quelque chose de positif et de vendeur. Car quand vous n’avez pas d’associé pour vous relever dans les coups de mou, il est important pour votre moral de conserver l’enthousiasme et le soutien de vos proches. Et le soutien des proches est primordial en temps que solo-entrepreneur. Ce sont les seuls à croire en vous quand vous traversez des moments de doute, vous ne pouvez pas leur montrer que vous doutez. Toujours se présenter confiant, toujours sourire, vendre, vendre, toujours vendre.

Les personnes avec je pouvais réellement parler des problèmes étaient mes amis entrepreneurs, les seuls à comprendre ce que je traversais et à avoir des pistes de solution à m’apporter. Discuter avec eux me permettait de me sentir un peu moins isolé.

3. Pouvoir confronter ses points de vue

Même si vous pouvez faire tout le travail vous même, un associé c’est quelqu’un avec qui brainstormer, quelqu’un qui vous empêche de prendre de mauvaises décisions ou qui peut vous remonter le moral quand les choses vont mal.

Avoir un co-fondateur c’est avoir quelqu’un à ses côtés qui peut vraiment vous challenger. C’est une personne toujours disponible pour un petit déjeuner le weekend quand vous avez une nouvelle idée dont vous avez besoin de discuter. C’est aussi la seule personne qui va vous donner un point de vue honnête et franc quand vous êtes dans l’erreur. En tant que solo-entrepreneur, vous aurez probablement des stagiaires ou employés autour de vous, mais du fait du lien de subordination ils peuvent être effrayés à l’idée de vous dire la vérité ou de vous challenger. Votre co-fondateur, c’est quelqu’un qui agit comme un contrepoids. Sans associé, pas de contradicteur à qui vous confronter, et ce débat à lieu dans votre propre esprit. Ce qui n’est pas sain et plutôt éprouvant. Avoir un associé qui pousse dans la même direction vous pousse à donner le meilleur de vous-même. C’est une motivation supplémentaire de développer toujours plus de compétences et être toujours plus ambitieux.

4. Partager le travail

Ce point paraît probablement évident. Mais il y une quantité impressionnante de boulot à abattre pour amener un business sur une trajectoire qui va lui permettre de « scaler », en particulier dans les premiers mois. Une question qui est souvent éludée, c’est celle de savoir qui va gérer la société pendant que vous allez lever des fonds ? Si vous ambitionnez de lever une somme respectable et que vous le faites de la bonne manière, ne vous attendez pas à avoir beaucoup de temps ni de bande-passante pour autre chose pendant 3 à 6 mois. C’est un job à plein temps en soi. Dans ces moments, avoir un co-fondateur à ses côtés, c’est avoir quelqu’un qui a des comptes à vous rendre et qui a autant à perdre que vous si la société ne fonctionne pas. Cette responsabilité partagée n’est pas seulement celle d’exécuter des tâches, c’est aussi celle de se dépasser dans les moments difficiles ou devant une deadline courte. Chacun va penser « je ne peux pas laisser tomber mon associé ou mon ami » : c’est l’une des plus forces de la nature humaine et c’est un puissant moteur de motivation.

5. Constituer une équipe complémentaire

Il est très peu probable qu’en tant que fondateur vous soyez capable d’apporter toutes les bonnes compétences sur la table. Même si vous le pouvez, ce n’est pas viable à moyen terme quand la société changera de dimension. Ce n’est pas seulement des compétences pratiques qui feront de vous de bons associés. La complémentarité se fait aussi sur des « soft skills » ou sur l’intelligence émotionnelle. Dans une équipe de fondateurs, certains peuvent avoir une appétence au risque alors que d’autres seront plus prudents. Certains peuvent avoir beaucoup d’empathie quand d’autres sont plus égoïstes. Certains s’appuient beaucoup sur leur instinct quand d’autres ne prennent aucune décision importante sans s’appuyer sur des données. Certains sont bons pour préparer l’avenir quand d’autres sont moins préoccupés par les détails ou la planification.

Différents traits de caractère aident à passer les nombreux obstacles qui émaillent une aventure entrepreneuriale, que ce soit de décider de pivoterou d’embaucher votre première recrue.

6. Croître plus vite

Les mauvaises associations sont une cause fréquente d’échec des startups. Pourtant quand l’alchimie au sein d’une équipe est bonne cela devient une arme redoutable. Il a été constaté qu’un solo-entrepreneur mettait en moyenne 3,6 fois plus de temps à atteindre le point où une startup est prête à scaler son business par rapport à une équipe de deux fondateurs.

7. Se mettre en position de lever des fonds

Le principal challenge pour un solo-entrepreneur est la recherche de financements ou de structures d’accompagnement. J’ai postulé plusieurs fois dans des incubateurs et accélérateurs et la réponse à toujours été la même : « c’est une bonne idée mais revenez nous voir quand vous aurez une équipe ». Il est très difficile pour une personne seule de faire fonctionner une entreprise. Cela rend l’aventure bien plus risquée pour des investisseurs qui prennent déjà beaucoup de risques lorsqu’ils investissent dans une startup. Il est compliqué de prouver à un investisseur que vous être capable de tout gérer, du développement informatique au marketing, car très peu de personnes possèdent toutes ces compétences. Et bien que touchant un peu à tout, je suis loin d’être expert en tout. Or, il n’est pas possible de scaler une marketplace comme MyTwist sur laquelle seuls de gros volumes de transactions vous permettent d’accéder à la rentabilité sans lever plusieurs millions d’euros au préalable.

Certes un bon investisseur, business angel ou capital risqueur s’intéresse de près au problème que votre startup souhaite résoudre ou à la taille de son marché. Mais l’équipe est la raison principale pour laquelle ils investiront. On l’entend souvent : « un investisseur mise sur une équipe ». Qu’est ce qui peut inquiéter un investisseur dans le fait de vous présenter comme solo-entrepreneur ? Il va se demander comment cela se fait-il que vous n’ayez pas réussi à convaincre ne serait-ce qu’un ami pour se lancer avec vous. Et c’est plutôt alarmant car vos amis sont ceux qui sont supposés vous connaître le mieux. Quel message cela envoie sur votre capacité à embaucher des personnes clés dans l’avenir ? Êtes vous quelqu’un avec qui il est difficile de travailler ? Êtes-vous trop introverti ? Ou encore pire, quelqu’un qui veut tout régenter et qui est incapable de déléguer ? Peut-être ce n’est pas le cas, mais ces questions vont sans aucun doute traverser l’esprit de votre interlocuteur.

Trouver un bon co-fondateur est difficile

La troisième raison principale d’échec d’une startup après “marché inexistant ou trop petit” et “financements insuffisants”, ce sont les problèmes d’équipe. Il n’y a rien de plus dangereux pour une startup qu’une mauvaise décision d’embauche, un personne qui ne correspond ou n’adhère pas à votre culture d’entreprise ou qui n’est simplement pas au niveau. Une mauvaise recrue est l’une des erreurs les plus risquées et coûteuses qu’une startup peut faire. En particulier en France où le droit du travail manque de souplesse et n’est pas adapté à l’agilité dont les startups ont besoin. Dans les premiers mois de votre startup, vos résultats reposent sur le travail d’une poignée de personnes et vous ne pouvez pas vous payer le luxe d’être mal entouré.

Au delà du product/market fit, ce qui fait qu’un produit se vend bien c’est la culture d’entreprise. Mais la culture d’entreprise, ce n’est pas proposer de la nourriture gratuite et à volonté, un babyfoot ou une fête de noël à vos employés. C’est partager une vision et des valeurs communes : le même socle pour toutes les discussions et la raison pour laquelle tout le monde travaille ensemble. Une bonne culture d’entreprise soude une équipe comme jamais, aide à traverser les moments difficiles et donne à la startup l’opportunité de gagner. Une bonne culture d’entreprise vous donnera l’impression qu‘il est « facile » de construire une startup à succès. Mais on ne met pas en place une culture d’entreprise quand on est seul.

Après mon échec, je recommanderais vivement à quiconque veut se lancer de s’entourer des profils clés pour son business, et ce AVANT même de démarrer. Ceci pour ne pas vous retrouver confronté au dilemme qui était le mien une fois lancé :

  • chercher un/une associé(e) ? J’en avais besoin, aucun doute là dessus. Mais c’est à peu près comme les rencontres amoureuses. Vous n’avez aucune idée de ce que cela va bien pouvoir donner. Il faut juste lâcher son clavier d’ordinateur, sortir, rencontrer des gens, networker et essayer. Le problème est que chaque café prend du temps. Et quand la personne en face de moi ne m’inspirais pas grande chose, je me posais la question suivante : n’aurais-je pas pu faire mieux usage de ce temps ?
  • ou me concentrer sur l’exécution ? Je suis quelqu’un qui préfère voir les choses avancer plutôt que d’en parler pendant des heures. Quand vous êtes seul à tout gérer, vous avez une to-do-listqui ne finit pas de s’agrandir et chaque tâche effectuée est un petit succès. Et contrairement aux rencontres humaines, j’avais au moins un certain contrôle sur les éléments de ma to-do-list. Je n’étais pas à court d’idées et jusqu’ici j’arrivais à les concrétiser. Le problème c’est que comme on dit dans la Silicon Valley, « startup ideas suck ». Exécuter peut être satisfaisant sur le court terme, mais ça peut aussi se révéler être une colossale perte de temps sur le long terme.

Est-il vraiment impossible de réussir lorsqu’on entreprend seul ?

Est-ce que j’encouragerais quelqu’un de créer une startup seul ? Clairement, non. Créer un business seul est bien sûr possible dans certains secteurs d’activité, mais c’est quelque chose de très difficile dans le numérique où l’innovation, l’internationalisation et la rapidité d’exécution sont des facteurs déterminants. Pour autant, je ne pense pas que c’est une mission impossible. Ce n’est simplement pas pour moi. En effet, être solo-entrepreneur ne signifie pas être seul. J’étais entouré de co-workers, j’ai été aidé par une stagiaire (merci Mathilde!), j’ai travaillé sur mon projet avec des développeurs, graphistes ou illustrateurs. Être seul n‘empêche pas de vous reposer sur des gens fiables ou qui croient dans votre projet. Mais ce support n’atteindra jamais le niveau d’investissement qui est le vôtre. Être solo-entrepreneur et réussir est possible, mais votre expérience professionnelle passée et vos ressources financières détermineront jusqu’où vous pourrez aller. Reposez vous sur un bon réseau pour vous aider et vous pourrez réussir si vous êtes suffisamment passionné. Je pense que les gens sont capables de grandes choses s’ils sont suffisamment déterminés. L’entrepreneuriat c’est une passion, porter un projet jusqu’au bout, profiter d’une opportunité de marché, prouver que vous aviez raison, ou ajuster les choses jusqu’à ce que ce soit le cas. Ai-je douté quand je voyais des startups avec des équipes structurées ? Oui bien sûr, mais ça ne m’a jamais stoppé dans mon élan. Et de fait, j’ai eu des résultats plus importants que certaines d’entre-elles, avec des ressources financières pourtant similaires, voir inférieures. La détermination est tout aussi importante que l’équipe.

Quelles leçons je retire de cette expérience ?

Dans l’écosystème startup vous entendrez souvent « fail fast, fail early, fail often ». C’est vrai ; on ne peut progresser sans échouer. Mais ce qu’on ne dit pas c’est à quel point c’est difficile pour un entrepreneur de se planter. De sacrifier ses relations amicales ou familiales, ses finances, sa santé pour son rêve et de finir avec…rien. Mais si vous vous trouvez un jour dans cette situation, souvenez-vous que d’autres sont passés par là. Ils ont rebondi et vous le pouvez aussi.

“ Progresser c’est changer d’erreur ? “

Pierre-Gilles de Gennes

1. Je ressors de cette expérience avec l’intime conviction qu’il m’a manqué de bons associés pour avoir une chance de réussir. Me lancer seul a été une erreur. Sortir un produit est facile. Le mener à la prochaine étape l’est moins. C’est comme courir un marathon : avec beaucoup de détermination et d’entraînement c’est possible. Sauf qu’à l’arrivée, vous devez en courir un deuxième tout de suite. Une course de relais, c’est quand même plus facile ! Entreprendre est une longue aventure et comme toute aventure, elle est plus enthousiasmante quand elle est partagée.

2. Associé ou non, un bon collaborateur est difficile à trouver. Trouver les bonnes personnes ne se fait pas par magie, ce n’est pas de la chance, c’est une compétence. A l’issue de mon aventure entrepreneuriale je dirais que savoir recruter, identifier un bon profil, convaincre une personne de tout quitter et de rejoindre son projet est une des compétences les plus importantes pour un fondateur. Les gens sont à la base de toute organisation. Mais ils sont encore plus déterminants dans une startup que dans une grande entreprise. Le recrutement est un art qui mériterait plus d’attention de la part des fondateurs de startups car apprendre à identifier le bon candidat ayant à la fois de l’expérience et correspondant à la culture d’entreprise que vous souhaitez voir s’installer est bien plus difficile qu‘on ne le pense. Si vous en doutez encore, jetez un œil à ces 34 questions ; je les utilisais comme prétexte à la discussion avec les potentiels associé(e)s que j’ai pu rencontrer. Vous constaterez rapidement que fonder un bonne équipe est loin d’être quelque chose d’évident.

3. J’ai pu réaliser qu’il était possible de faire énormément avec peu de moyens humains et financiers. Quand on est très limité par ses ressources, on apprend à « bootstraper », dénicher tous les services gratuits qui existent, négocier tout, donner l’impression d’être plus grand que ce qu’on est, faire illusion avec quelques astuces graphiques, prioriser ou reporter les dépenses… Une startup n’a pas le luxe de pouvoir faire beaucoup d’erreurs. Les premières années, vous serez toujours limité en ressources et malgré cela vous devez proposer un produit génial, réussir à le distribuer, faire face à plus gros que vous et trouver un business model. Mais le manque de ressources pousse à se poser les bonnes questions. A l’inverse, le confort financier signifie souvent moins bien utiliser cet argent, voire le gaspiller.

4. Mettre une marketplace en position de scaler prend beaucoup plus de temps que je le pensais. Avec du recul, je me dis que mes ressources financières étaient insuffisantes pour tenir le temps d’obtenir un financement.

5. Les plus gros challenges pour l’entrepreneur ne sont pas ceux du monde extérieur, comme le financement, le développement informatique, la technologie ou le recrutement. Ces défis sont souvent enthousiasmants quand on les approche avec philosophie. Les plus gros défis sont à l’intérieur de soi, comme le stress, le doute ou la peur.

6. J’avais choisi de ne pas monétiser MyTwist tout de suite. La monétisation devait se faire sur du commissionnement mais je souhaitais d’abord valider mon idée en la confrontant au marché et générer un volume de transaction minimum avant de complexifier le produit en ajoutant du paiement et des services. Prendre une commission sur 20 transactions par semaine ne fait pas beaucoup de sens et ne paye pas les factures. Même si le sujet de la monétisation est souvent une obsession des personnes habituées à des modèles d’affaires plus « traditionnels », de nombreuses marketplaces ont mis beaucoup de temps avant de monétiser. Ce que je n’avais pas réalisé c’est l’impact de la « gratuité » sur ma propre motivation. Sur le long terme, il n’est pas évident de rester mobilisé sur un travail qui vous occupe 60h par semaine mais duquel vous ne retirez aucune rétribution.

7. La plupart des startups échouent et pourtant nous ne parlons pas beaucoup de l’échec. J’encouragerais tout le monde qui échoue à écrire ce qu’ils ont ressenti. Je réalise que l’échec n’est pas aussi difficile à vivre que ce que j’avais anticipé. Je ressors de cette expérience un peu fatigué nerveusement et avec des dettes. J’avais peur de perdre la face vis à vis de mon entourage ou de l’écosystème. Mais finalement ce n’est que de l’argent perdu et une énorme expérience acquise.

Et maintenant ?

Il est plus facile d’accepter la défaite quand vous avez essayé encore et encore mais que ça n’a mené nullepart. On appelle ça une expérience ratée. L’échec est facile à expliquer. Il est par contre beaucoup plus frustrant d’essayer encore et encore, commencer à avoir de la traction sur son produit et finalement s’écraser. C’est un peu dans ce second cas que je me sens. Tout aurait pu être si différent avec un équipe. Il y a de nombreuses choses que j’aurais fait différemment si je devais recommencer. Mais je ne regrette rien. J’ai beaucoup appris de mes erreurs et je réalise aussi à quel point la chance et le timing sont aussi de gros facteurs dans un succès ou un échec.

J’ai vu assez d’entrepreneuriat pour savoir que c’est pour moi. Je pense que je recommencerai un jour. Je ne sais pas quand et ce ne sera pas tout de suite, c’est certain. La prochaine fois, je ne serais peut être pas le pilote mais je pense que je serais impliqué d’une façon ou d’une autre. Je ferais d’autres erreurs mais certainement pas les mêmes. Créer sa startup c’est apprendre encore et encore jusqu’à ce que vous tapiez dans le mille (ou les millions). Après tout, il suffit d’avoir raison une seule fois.

Après avoir décidé de fermer ma boîte, mes proches me demandent souvent si je vais bien. En fait, je pense que oui. C’était une aventure chaotique mais il est temps de passer à autre chose. Je suis actuellement coursier à vélo pour une boîte de livraison à la demande : je fais 200 kilomètres de vélo chaque semaine, au soleil et dans la plus belle ville du monde. De quoi me renflouer un peu, reposer mon esprit, réveiller mon corps et pouvoir prendre le temps qu’il faut pour trouver un job qui me correspond. Probablement dans une startup, mais en tant que salarié pour cette fois !

par Jonathan Levitre

Devenir franchiseur : comment s’assurer que son concept est duplicable ?

franchise image

Vous êtes sur le point de franchir le cap : passer de simple dirigeant à franchiseur. Mais comment être sûr de soi ? Pour que la réussite de votre point de vente puisse être reproduite à grande échelle, il est fondamental de prendre en compte un certain nombre de paramètres.

Formaliser les facteurs de réussite de son concept

Le point de départ pour devenir franchiseur ? Avoir un concept original, qui répond à une demande et qui soit reproductible. Avant de se lancer, il faut être sûr que son succès n’est pas simplement dû à sa personnalité de commerçant, à l’ancienneté de son enseigne et de ses clients. Un magasin performant à un endroit doit pouvoir essaimer  dans d’autres zones géographiques et avec d’autres dirigeants. Pour mettre toutes les chances de son côté, il faut passer au scanner les facteurs de sa réussite. Formalisez précisément votre concept en répertoriant les caractéristiques du magasin (emplacement, surface, aménagement), celles de l’offre (vos fournisseurs, prix d’achat, stock, merchandising des produits), la stratégie commerciale (positionnement, actions commerciales, argumentaires des vendeurs), la communication, etc. En identifiant clairement toutes ces caractéristiques, vous obtiendrez le portrait-robot de votre magasin. Cette base servira de modèle à vos futurs franchisés. Il est important de pouvoir se reporter à document écrit qui formalise le concept à reproduire.

Ce travail de registre vous servira également à améliorer votre concept. Vous vous rendrez compte par exemple de la nécessité de changer la présentation de tel ou tel produit, de moderniser votre logo, ou de faire le tri parmi vos fournisseurs… Avant de se lancer en franchise, on s’aperçoit souvent qu’il faut investir pour se moderniser, créer une identité graphique, des outils de communication (site internet, plaquette, flyers…).

Protéger sa marque et choisir son type de contrat

Autre étape à ne pas négliger : le dépôt de sa marque et de son savoir-faire. Pour que les futurs franchisés puissent l’exploiter, il faut d’abord protéger son concept. Plusieurs options existent : le dépôt d’un simple nom, d’un logo ou le dépôt d’une  marque semi-figurative, avec le nom et un élément graphique associé. La rédaction d’un document destiné à enregistrer et protéger une marque nécessite des compétences particulières. Mieux vaut se faire accompagner par un professionnel.

En restant dans le domaine juridique, il faut également choisir le cadre formel de l’exploitation du concept en réseau : franchise, licence de marque, location-gérance, commission-affiliation, concession… Un avocat vous donnera des conseils sur la meilleure solution à adopter selon votre activité. Dans l’habillement par exemple, la commission-affiliation reste la forme la plus courante. Enfin, il faudra prévoir votre plan de développement : le recrutement et la formation des franchisés, les conditions d’entrées, le calendrier de déploiement, l’animation du réseau et la communication… Devenir franchiseur est une étape importante dans la vie d’un dirigeant. Il s’agit d’apprendre quasiment un nouveau métier !

Le pitch : 8 erreurs fatales

elevator pitch de l'échec au succès

Il existe une large documentation sur le pitch. Pourtant, de nombreux entrepreneurs commettent inlassablement les même erreurs. Que ce soit sur le fond ou la forme, il y a des gestes, des choses à ne pas dire, une préparation spécifique à réaliser sous peine de commettre des erreurs disqualifiantes. Quelles sont ces erreurs à éviter ?

 Pitch Erreur numéro 1 : ne pas être clair

Cela va vous paraître évident … et pourtant ! Combien d’entrepreneurs se plantent lors de leur présentation.. Combien de jury se disent à la fin d’une présentation : « Mais au fait, que fait cette entreprise ».
Exemple classique : « J’aimerais vous rencontrer pour une levée de fonds. Ma société cherche de l’argent pour se développer sur le marché de la boulangerie. Notre concept basé sur la technique du juste à temps va révolutionner le marché ». = > vous comprenez quelque chose ? Vous êtes capable de dire ce que fait l’entreprise ? C’est l’exemple classique de l’entrepreneur qui met des mots grandiloquents mais où il n’y a rien de concret.
Enfin, souvent, les entrepreneurs très bien préparés ont tendance à aller… très vite sur le pitch en récitant à toute allure. L’effet sera désastreux ! Prenez le temps de respirer, accepter et tirez bénéfice des silences. Mieux vaut en dire moins, calmement que plus à toute vitesse.

Pitch Erreur numéro 2: vouloir être exhaustif

Dans un elevator pitch, il est tout simplement impossible de tout dire ! N’essayez donc pas ! De nombreux entrepreneurs partant d’une bonne intention cherchent à démontrer à quel point ils sont différents de leurs concurrents. « Nous sommes différents car nous sommes moins chers, nous produisons local, notre technologie est plus rapide, plus écologique et en plus le produit est plus solide. » Ne donnez pas toutes les caractéristiques mais uniquement celles ( trois maximum) qui vous donne un avantage concurrentiel fort. Pas plus !
Si nous devions retenir un exemple : « QUICK, nous c’est le goût. ». C’est court, on comprend tout de suite leur positionnement. Ils ne donnent pas toutes les caractéristiques de leur produit. Seulement la plus marquante.

Pitch, Erreur numéro 3 : oubliez de demander quelque chose 

Ne perdez jamais de vue l’objectif de votre pitch : Que ce soit obtenir un rendez-vous, poursuivre la conversation, obtenir des conseils, une ouverture de réseau ou pouvoir donner votre business plan, vous devez à la fin du pitch proposer une suite à cette première approche . »Puis-je avoir une carte de visite ». « On pourrait peut-être en parler plus lors d’une réunion ?  » « Avez-vous déjà travaillé dans ce secteur ?  Que pouvez-vous me conseiller ? ». N’hésitez jamais à demander un service à votre interlocuteur. Pour obtenir, il faut demander. Mais pour obtenir, il faut aussi avoir été convaincant !

Pitch, Erreur numéro 4 : Le jargon technique 

C’est l’erreur typique des projets techniques. L’entrepreneur veut tellement se rassurer en montrant qu’il maîtrise sa technologie, technologie qui est la « meilleure », qu’il détaille le tout, montre son expertise avec le jargon le plus poussé possible et… en oublie d’intéresser ses interlocuteurs. Le pitch n’est pas là pour démontrer votre expertise mais pour donner envie de vous revoir. Vous aurez tout le loisir de souligner votre expertise lors de questions réponses ou plus tard lors d’une due diligence plus poussée.

Pitch erreur numéro 5 : Etre trop classique

En effet, lors d’un pitch, les investisseurs, le jury et même votre banquier demandent à se rappeler de vous. Ils analysent des centaines de dossiers, souvent très bons. Passer du statut de très bon dossier à excellent ou à « celui dont je me rappelle » demande de marquer les esprits lors du pitch. Une bonne phrase d’accroche, une histoire, une anecdote, un ton enthousiaste vous aideront à faire de votre pitch, un instant mémorable pour vos interlocuteur.

Pitch erreur numéro 6 : Vouloir être trop original

Si l’on vous demande de vous démarquer lors du pitch, nous avons vu beaucoup d’entrepreneurs vouloir être trop original et passer à coté de leur présentation. N’oublions pas que le pitch obéit tout de même à quelques règles qu’il est bon de respecter. Votre objectif: faire comprendre ce que vous faites, sur quel marché, avec quel équipe, quel positionnement et quel business model. Si vous cherchez à capter l’attention dès le début, c’est très bien, mais ne cherchez pas non plus à être original durant les 10 minutes de votre présentation.

Pitch erreur numéro 7 : Parler de votre compte de résultat pendant 5 minutes

Sincèrement, ce n’est pas l’objectif d’un pitch. Tout ce que voudra vérifier votre interlocuteur, c’est une idée de votre résultat d’exploitation et du CA à 3 ans (et encore, il sait que ce chiffre est faux). Donc donnez ce chiffre (cela prend 5 secondes) et passez à autre chose ! Vous n’avez pas le temps ! Il vaut mieux détailler votre business model plutôt que de décrire votre compte de résultat (qui est disponible dans votre business plan et faux par définition). Trop d’entrepreneurs pensent à tort que face à des financiers il ne faut parler que des chiffres financiers. Ce n’est pas du tout l’essentiel ! Donc 10 secondes maximum !

Pitch erreur numéro 8 : survendre son projet

L’entrepreneur est un vendeur. Et il faut, dans votre pitch, vendre une part de l’aventure, du rêve que vous cherchez à accomplir. Cependant, cela ne signifie aucunement être prétentieux et survendre votre produit ou votre service. Combien de fois entend-on « mon produit est unique et révolutionnaire » alors qu’il s’agit d’une copie améliorée d’un produit existant ou un copy cat étranger. Un peu d’humilté. Pas trop de grandiloquence dans les mots (« génial, extraordinaire, fantastique »). Etre vendeur ne signifie pas être bonimenteur.

Et vous, quelles erreurs avez-vous commises lors de votre pitch ?

la méthode qui plante 93 start-up sur 100

la méthode qui plante 93 start-up sur 100

Il y a de nombreux présupposés qui sont admis sans discussion dans l’écosystème des start-up, des concepts et des phrases répétées à l’envi, qui tournent souvent «à vide» et qui dans les faits n’ont pas d’effets vraiment concluants. L’univers des start-up s’est doté ces dernières années de méthodes et d’outils très séduisants et unanimement adoptés. Pourtant, la plupart des start-up continuent de se planter lamentablement…

Dans un contexte économique sérieux, les professionnels se poseraient certainement des questions quant à leurs méthodes et leurs outils. Mais l’écosystème des start-up pense qu’il est normal et rationnel d’encourager et d’organiser le plantage de 97% des projets. L’idée étant que des 3% de «survivants» émergeront sans doute les Google ou les Facebook de demain.

Il serait intéressant mais sans doute cruel d’analyser le parcours des 3% de survivants pour déterminer la part de ceux qui sont partis poursuivre leur aventure aux États-Unis ou ceux qui ont fini dans l’escarcelle d’un grand groupe. Je n’ai rien à redire à ces trajectoires… à part peut-être qu’elles ont toutes deux été financées par de l’argent public.

Les start-up sont soumises autant que les autres créations d’entreprises à des lois simples du business: laisser imaginer qu’elles échapperaient à l’attraction terrestre par je ne sais quel mystérieux phénomène lié à Internet explique la plupart des plantages.

Je vous propose un petit tour des mythes de l’univers des start-up qu’il faudrait démonter pour que tout le monde, entrepreneurs, incubateurs et investisseurs, reparte du bon pied, avec des taux de succès décents.

Le business model

Il y a cette idée qu’une start-up peut commencer sans modèle économique : elle le découvrira en cours de route par le jeu d’essais et d’erreurs. Cette approche serait parfaite si les entrepreneurs avaient un crédit temps illimité. Or ce n’est pas le cas ! Vous pouvez compter tout d’abord sur la «malédiction des 6 mois» : 6 mois, c’est la durée empirique au-delà de laquelle l’équipe d’un projet commence à se déliter si aucun résultat probant n’est en vue.

Vous avez ensuite la malédiction des «1 an et demi» : l’équipe voyant arriver la fin de ses indemnités chômage commence à préparer sa survie alimentaire. Les associés commencent à accepter des missions de conseil par-ci par-là, la start-up se transforme en web agency classique (d’ailleurs, en commençant par là, elle aurait gagné du temps). Partir sans business model est un handicap totalement inutile. L’outil communément utilisé par l’écosystème est le Business Model Canvas qui permet de représenter de manière visuelle et synthétique le modèle économique de la start-up. Chaque aspect du modèle économique étant compris dans un bloc : avec un bloc pour l’offre, un bloc pour les partenaires, un pour les canaux de distribution, etc. Cet outil est parfait pour expliquer comment fonctionne une start-up qui «marche» déjà, pas pour jouer aux business models.

Il faut créer un business à partir de blocs que l’on possède déjà (et s’il n’en fallait qu’un, je dirais qu’il faut mieux posséder déjà le canal de distribution), et non pas à partir d’un canvas vide !

Pour résumer : «un canvas vide = ne monte pas de start-up».

Enfin, il n’y a pas plus d’une bonne vingtaine de modèles économiques, et si les technologies numériques les ont souvent effectivement impactés, ces modèles restent les mêmes que du temps des Phéniciens. L’exploration des modèles économiques devrait être restreinte aux modèles qui sont maîtrisés et compris par l’équipe. Chaque modèle nécessite des compétences et des savoir-faire techniques qui ne s’improvisent pas. Si vous connaissez le fonctionnement d’un négoce ou d’une assurance, restez sur ces modèles !

Lean Startup

Il s’agit d’une méthode de démarrage d’activité, fondée sur la validation des concepts auprès des futurs clients par une démarche itérative : l’idée étant d’obtenir un produit ou un service parfaitement adapté au marché. Il s’agit en somme de partir à l’exploration de la clientèle. Cette approche est très bonne pour mener des tests et améliorer un produit. Utilisée seule, elle donne les mêmes résultats qu’une mission d’exploration au XVe siècle : ou bien vous trouvez l’Amérique en partant chercher l’Inde… ou bien vous vous perdez en mer.

Utilisez cette méthode pour améliorer ou compléter une offre que vous êtes déjà capable de vendre, ou pour valoriser un actif solide que vous possédez déjà. Si cette démarche s’appuie uniquement sur une simple idée que vous voulez valider auprès d’un segment de clients supposé, vous êtes dans la démarche critiquée plus haut : votre canvas est vide !

Le Growth Hacking

Le Growth Hacking est l’idée de coupler une bonne connaissance du marketing à un esprit «hacker» pour inventer des solutions intelligentes et petit budget pour promouvoir votre offre. Cela est super, mais les compétences techniques pointues à la mise en œuvre de ces techniques nécessaires font défaut à la plupart des équipes de start-up. Ne sous-estimez pas le temps nécessaire à piger comment tirer parti de solutions que vous utilisez déjà pourtant au quotidien, comme Facebook ou Twitter. Je dirais que deux ans d’apprentissage dans la douleur est une bonne estimation du temps qu’il faut pour commencer à obtenir de bons résultats avec régularité.

Produire des solutions digitales et des applications est relativement simple, les distribuer aussi. Faire connaître votre solution reste le vrai challenge. Pensez à tous ces studios indépendants de jeu vidéo qui ont sorti un succès à 1 million de téléchargements, qui ont recruté, puis produit la suite du jeu dont ils ont vendu 7 000 exemplaires à peine (ou moins). Si vous n’avez pas une brute du marketing dans l’équipe (et j’ai bien dit une brute, pas un copain qui «touche un peu»), vos résultats seront aussi aléatoires que ces studios indépendants.

La petite matrice qui va bien pour tout comprendre

Voici une petite matrice pour vous expliquer le chemin que doivent parcourir les start-up et comment elles peuvent pondre l’innovation de rupture qui nous fait tous tant rêver.

Axe horizontal (représente l’équipe) : vous êtes à gauche si vous êtes un pro, à droite si vous êtes un amateur (si vous vous lancez dans un métier que vous ne connaissez pas).

Axe vertical : vous êtes en haut si vous êtes dans une activité mesurable, où les variables sont connues (en gros, vous êtes capables de dire combien peut rapporter une heure de travail ou un euro investi). Vous êtes en bas si vous n’êtes pas capable de faire apparaître une relation claire entre vos efforts et vos résultats (vous êtes un artiste, ou vous n’avez pas de modèle économique).

La plupart des start-up commencent avec des amateurs et un modèle économique flou :

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Le plan consiste à passer en moins de 6 mois avec une démarche Lean Startup à une activité « mesurable et organisable », avec un business model qui fonctionne.

Il faut ensuite affiner tout ça et améliorer le système (passer « pro » en somme). Il faut compter au moins deux ans avant de « passer pro ».

Les start-up intelligentes commencent sur un métier et un environnement qu’elles maîtrisent. Elles comprennent suffisamment bien leur modèle économique pour essayer de le transformer.

Il y a quelques beaux exemples de réussites françaises ayant commencé avec un métier, comme Ventes Privées (grossistes) ou encore Le Bon Coin (petites annonces).

Saviez-vous que même Jeff Bezos a pris des cours pour apprendre à gérer une librairie avant de créer Amazon ?

 

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La conclusion est simple : quitte à faire un tour d’horloge de développement de start-up : commencez dans le domaine que vous maîtrisez et où vous disposez déjà d’actifs.

Thomas-Guyon

Thomas Guyon est un vétéran de l’écosystème de la création d’entreprise en Ile de France. Il a notamment dirigé l’incubateur de la Cité des 4000 à la Courneuve durant plus de 7 ans. Il intervient sur les thématiques de l’économie de la débrouille et de l’économie numérique aussi bien en France qu’à l’international. Thomas Guyon est aussi auteur et créateur de jeux vidéos à ses heures.

Par Thomas Guyon, ancien directeur d’incubateur et entrepreneur

 

Comment trouver une idée de création d’entreprise

creation entreprise

Chacun de nous a au fond de lui, une force secrète qui peut le conduire à améliorer son quotidien ou changer son destin. Pour une majorité de Français, porter un projet, créer son entreprise, se situe dans le domaine du rêve… De l’exploit presque impossible ! Et pourtant chaque année, ils sont plus de 500 000 entrepreneurs à franchir le cap avec enthousiasme et enfourcher le cheval de l’espoir et la liberté. Pour ces créateurs de tous horizons, l’expérience sera rude mais riche en découvertes et en satisfactions professionnelles.

 

Je veux être mon propre patron… Mais avant de faire le grand saut, je dois faire le point. D’abord sur mes motivations. Je crée ma boîte pour gagner plus, pour assouvir une passion et en faisant mon métier, pour défendre un idéal ou obtenir de la reconnaissance sociale. Mais aucun projet n’est jamais à  100 % passionnel, sociétal ou financier.

 

Envisager l’avenir. Décrire mon projet à échéance d’un an, de trois ans, à plus long terme pour fixer un cap. Puis revenir à cette feuille de route régulièrement pour vérifier que les bonnes options ont été prises et respectées, au besoin pour corriger la route. Mesurer avec précision les risques financiers que je vais prendre : « Combien de temps vais-je attendre avant de me verser mon premier salaire ? Puis-je me permettre de ne pas être payé pendant trois mois, six mois ? Quels investissements en fonds propres suis- je prêt à engager sur mes biens personnels ou familiaux ? »

 

Pour passer à un projet réaliste, la première chose à faire est de bien définir l’origine de votre idée, c’est-à-dire d’exprimer clairement cette fameuse idée que j’ai déjà ou que je recherche car tout projet de création d’entreprise commence par une idée.

 

Qu’elle naisse de mon expérience, de mon savoir-faire, de mon imagination ou d’un simple concours de circonstance, il s’agit souvent au départ d’une intuition ou d’un désir qui s’approfondit et mature avec le temps. Quelle que soit son origine, l’idée ne représente, au départ, rien de bien concret. Plus mon idée est nouvelle, plus je dois m’interroger sur la capacité de mes futurs clients à l’accepter ! Plus mon idée est classique ou banale, plus je dois réfléchir à sa réelle utilité par rapport à l’offre déjà existante sur le marché.

 

Une idée n’est pas un produit. Cette évidence n’est pas forcément partagée par les créateurs d’entreprise ou même les chefs d’entreprise confirmés. Une idée doit être confrontée à au moins trois éléments pour devenir un produit sur lequel une entreprise pourra fonder son développement. Il s’agit:

 

  • du marché
  • de la technologie
  • des budgets

 

Le produit n’existera que s’il a un marché, c’est-à-dire s’il correspond à une demande ou s’il  apporte une solution à un problème que se pose une clientèle. Toutefois, cette clientèle n’aura d’intérêt que si elle est solvable, c’est-à-dire si elle est en mesure de payer un prix suffisant pour permettre à l’entreprise qui commercialise le produit de faire un profit. Quel est le degré attractif de mon marché ? Il s’agit du potentiel d’association entre l’exercice du « métier » assigné à l’entreprise et les opportunités d’activité du (des) marché(s) sur lesquels l’entreprise compte agir. Tout marché a des valeurs propres incontournables qu’il convient de cerner avec lucidité : sa taille, son taux de croissance, son degré de maturation, ses « tickets d’entrée » (canaux de distribution), sa localisation (dispersion, concentration).

L’étude de marché permet de confronter une idée de produit à ses marchés potentiels et donc de définir les fonctionnalités attendues pour les inclure dans le produit.

La définition d’un produit par l’étude de marché (« Marketing designed product ») est généralement la façon la plus opportune de concevoir un produit nouveau.

 

Vous avez deux solutions pour tenter de régner sur un créneau de marché, être le n°1 sur un marché : Déloger celui qui s’y trouve déjà (c’est difficile, long et souvent coûteux) ou trouver un créneau vierge et inoccupé et s’y installer à demeure (le plus difficile étant bien entendu de trouver le créneau…  mais l’étude de marché spécifique est là pour ça).

Aborder de front la concurrence (sauf savoir-faire exceptionnel) n’est pas le meilleur moyen de réussir lorsqu’on lance une nouvelle activité. Il est préférable de se démarquer de l’influence des autres entreprises, d’étudier les failles et faiblesses des concurrents, de repérer les marchés délaissés et les nouveaux créneaux.

Choisir la « niche » de marché, choisir un positionnement de niche, c’est le moyen idéal pour  imposer ses prix au plus haut niveau et donc pour rentabiliser le plus vite possible son entreprise : éviter d’aller là où tout le monde se rue (ou va se ruer), privilégier les territoires vierges, rapidement accessibles (canaux de distributions souples et rapides, dispersion de la clientèle limitée….).

Le positionnement idéal est rarement obtenu en perfectionnant ses produits (ou services) dans le but de satisfaire le plus grand nombre de couples « besoins-fonction ». Il y aura, inévitablement, des clients que vous n’aurez jamais (ou difficilement), sauf à vous disperser dangereusement … ce qui engendrerait forcément des coûts et surcoûts (paramètres prix, marché, canaux de distribution, communication…) : Renoncez à courir tous les lièvres à la fois. Présentez-vous au grand jour sur un (des) type(s) de marché sous un (des) aspect(s) donné(s) et évitez d’en changer à tout va.